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lundi 7 janvier 2013

Une famille pas très «sainte»


La famille de Jésus – Une famille pas très «sainte»


Le dernier dimanche de décembre la liturgie catholique célèbre la fête de la «Sainte Famille de Nazareth ». Le but de cette fête «catholique» est de présenter aux chrétiens la famille de Jésus comme une famille exemplaire, idyllique où tout beigne dans l’amour, l’harmonie, l’entente, la compréhension, le respect réciproque, la paix; le tout vécu dans une atmosphère religieuse de piété et de sainteté, de dévotion de contemplation, d’expériences mystiques face aux merveilles opérées par la présence de Dieu dans la vie de chacun.

Mais c’est une fausse présentation ! En réalité, l’atmosphère qui règne dans cette famille est loin d’être exemplaire et idyllique. Si cette famille est «extraordinaire» comme dit la tradition chrétienne, c’est plutôt à cause des problèmes et des difficultés extraordinaires (= hors de l’ordinaire) qu’elle a dû affronter.

 Commençons par la mère, Marie. Le drame de cette femme, pour qui son premier-né Jésus a été le fruit d’un grand amour qu’elle a reçu comme l’accomplissement de ses désirs les plus secrets et comme le plus beau cadeau du Ciel, le drame consiste dans le fait que cet enfant, tant attendu et tant désiré et en lequel elle  avait mis tant d’espoirs, de fait, il ne lui a jamais vraiment appartenu. Il a été, dès les débuts, un enfant qui a semblé se dérober à son affection et à sa protection; qui ne s’est jamais laissé traiter comme une propriété de sa mère; qui ne s’est jamais laissé encadrer dans les structures traditionnelles de sa famille, de la société, de la culture et de la religion de son époque; qui toujours voulu utiliser d’une liberté, d’une indépendance que cette mère, possessive comme toutes les mères, a eu beaucoup de difficulté à accepter et à intégrer à sa vie.

Il y a eu ensuite le contexte familial concret dans lequel Jésus a vécu : une famille paysanne, avec des nombreux enfants et des parents incultes mais très religieux. Et au sein de cette famille, le fils aîné qui pense avoir reçu de Dieu une mission importante à accomplir. On peut imaginer les affrontements, les tiraillements, les conflits, les frictions, les incompréhensions ( qui apparaissent  tout au long de la vie de Jésus)  où  le père, la mère, plusieurs  frères et sœurs  doivent  gérer ensemble  une  vie commune  avec ce frère aîné,  spécial,  difficile, original,  qui ne réussit à  trouver sa place nulle part.

C’est une famille qui a dû, en plus, passer à travers l’affreuse, l’éprouvante et la déchirante expérience d’avoir  élevé en son sein une «tête chaude», un frondeur, un perturbateur, un contestataire, un visionnaire, un genre de messie  révolutionnaire qui sera éliminé comme un  vulgaire criminel, pendu au poteau d’une croix.

La fin  ignominieuse  de ce fils ne fut  pas l’événement d’un instant. Elle s‘est préparée tout  au long de sa vie en famille : de l’enfance, en passant par l’adolescence, à travers la jeunesse, jusqu’à l’âge adulte. Ses parents, ses frères et sœurs ont été les témoins de sa transformation et de sa maturation intérieure qui n’allaient pas du tout dans le sens de la normalité, des idées reçues, des traditions acceptées, de la soumission docile aux autorités constituées. Cet enfant, cet adolescent, ce jeune-homme avait des convictions toutes personnelles qui contrastaient avec celles des autres. Il critiquait le formalisme de la pratique religieuse. Il dénonçait l’inutilité de la religion pour le bonheur et le salut de l’homme. Il dévoilait la vanité et l’hypocrisie de la caste sacerdotale. Il affirmait la nécessité d’un rapport direct avec Dieu,  bâti dans la confiance,  la vérité, l’authenticité  et l’amour. Jésus a dû sans doute scandaliser à maintes reprises ses parents avec ses  idées pas très orthodoxes sur la fonction de la Loi, sur la nature de Dieu, sur la nécessité de nettoyer la  religion de tout ce qui asservit  la personne et au lieu de la libérer. Dans cette famille Marie et Joseph ont dû, sans doute, se mettre souvent les mains dans les cheveux, en écoutant les propos de ce fils pas comme les autres, qui ne finissait pas de les surprendre et de les chavirer. Je n’aurais pas été surpris  d'entendre Marie s’exclamer, en écoutant les discussions de Jésus avec son père et ses frères et sœurs : «Mais quel genre d’enfant ai-je mis au monde ! »

Dans cette famille Jésus n’a jamais été un enfant ni commode, ni complaisant, ni docile, ni très poli. Vous pouvez facilement imaginer le stress que les parents ont dû vivre avec un fils de ce genre, qui malgré tous leurs efforts, ne change pas, ne s’améliore pas, au contraire, il empire, il persiste à faire à sa tête, à avoir des drôles d’idées et qui en plus affirme que ses idées lui viennent directement de Dieu. Un fils comme cela a tout pour rendre impossible la vie de ses parents. L’évangile nous dit que devant le comportement  de cet enfant, sa mère intriguée passait des heures à s’interroger, à réfléchir et, j’ajouterai, … à pleurer.

Jusqu’au jour où cet enfant impossible prend le large, quitte la maison paternelle où il se sent incompris et suffoqué. Il part pour suivre son destin. Pour vivre sa liberté et en liberté. Pour crier aux quatre vents les convictions qui l’habitent et la foi qui le fait vivre. 

Jésus  gardera toujours, tout au long de sa vie publique, des relations conflictuelles avec sa famille. Sa famille, ses frères et sœurs ne lui seront (au moins aux débuts de son activité) d’aucun soutien dans  l’accomplissement de la mission qu’il affirmera avoir reçue de Dieu. Au début, ils le prennent même pour un exalté, pour quelqu’un qui a perdu la tête et, craignant pour sa sécurité,  ils veulent  lui faire comprendre le bon sens et le ramener de force à la maison pour que cesse cette dangereuse comédie. Mais Jésus est de la race de ceux qu’on ne manipule pas facilement. Ils doivent donc se résigner à le laisser à  son destin,  car ils se rendent  compte que tous les efforts déployés pour le ramener  sur «le droit chemin» ne servent finalement qu’à l’éloigner d’eux toujours davantage et à le confirmer encore plus dans ses positions.

Jésus ne parlera jamais de son père; il gardera toujours à distance sa mère. Il ne mêlera jamais sa famille à ses activités de thaumaturge et de prédicateur. Il  ne  permettra pas que les agissements (bien intentionnées) de ses frères et sœurs entravent d’une façon  quelconque la route  qu’il pense devoir suivre.

Lorsqu’on a tout cela à l’esprit, comment dire de Jésus qu’il a vécu dans une famille idéale, exemplaire, dans une «sainte famille» ? La «Sainte Famille» n’est qu’un mythe de la dévotion chrétienne qui, au cours des siècles, a cherché à enjoliver avec les couleurs de la sainteté et de la perfection  tout ce qui a trait  à la vie de Jésus, afin que tout devienne paradigme et modèle pour chaque chrétien.
Mais ce qui est admirable dans cette famille si éprouvée c’est le fait que Jésus ait été capable de la faire évoluer et de la conduire à entrer dans l’acceptation de sa vision des choses, de sa foi et de sa mission et finalement à l’incorporer pleinement  à la réalisation de sa  nouvelle  communauté de croyants. Après la mort de Jésus, sa mère deviendra une figure clef dans le groupe des disciples du Maître de Nazareth. Pendant des années, Jacques, l’un de ses frères, deviendra  l’organisateur et le responsable principal  de la communauté chrétienne qui avait pris naissance à Jérusalem.


 MB


PS Les frères de Jésus sont mentionnés dans plusieurs versets du N.T.  Matthieu 12:46, Luc 8:19 et Marc 3:31 disent que la mère et les frères de Jésus vinrent le voir. Les évangiles nous disent  que Jésus avait quatre frères: Jacques, Joseph, Simon et Judas (Matthieu 13:55). Ils  nous disent aussi que Jésus avait des sœurs, mais elles ne sont pas nommées ou numérotées (Matthieu 13:56). Dans Jean 7:1-10, ses frères vont à la fête, tandis que Jésus reste derrière. Dans Actes 1:14, ses frères et sa mère sont décrits comme en prière avec les disciples. Galates 1:19 mentionne que Jacques était le frère de Jésus. La conclusion la plus naturelle de ces passages est d'interpréter que Jésus avait effectivement des frères et sœurs de sang.

Mais ce qui pousse les catholiques à nier et à altérer, d’une façon malhonnête et partisane, le sens obvie de ces textes d’évangiles c’est  leur attachement au dogme-mythe de la «virginité  perpétuelle» de Marie, la  mère de Jésus, dogme que les catholiques comprennent et interprètent  d’une façon matérielle, physique, génitale et  physiologique .

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