(Matthieu 22, 15-21)
L’évangile de Matthieu a été écrit autour des années 80-90
pour les juifs de Palestine qui avaient embrassé le nouveau mouvement spirituel
issu du Prophète de Nazareth. La ville de Jérusalem, centre emblématique de la
religion juive et symbole de la foi au vrai Dieu, avait été rasée au sol avec
son Temple en l’année 70 par l’armée romaine au solde de Tite. Donc, dix ans
après, la communauté chrétienne de Matthieu se posait un problème de conscience:
faut-il s’opposer à l’autorité établie? Faut-il obéir à l’autorité de
l’occupant ? Faut-il se soumettre à ses impositions? Faut-il payer l’impôt à
l’envahisseur, personnifié par l’empereur de Rome qui se considérait comme l’incarnation
de Dieu sur terre et se faisait appeler «Deus, Optimus, Maximus, Seigneur Dieu
Tout-Puissant»?
D’où l’origine de ce texte de Matthieu et des paroles qu’il
met sur les lèvres de Jésus présenté en polémique avec les pharisiens: "Montrez-moi
la monnaie de l’impôt… Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à
Dieu ". Anecdote comique, si
l’on veut, où l’arroseur est arrosé, mais où se manifeste aussi l’acuité
intellectuelle et la profondeur étonnante des intuitions spirituelles et religieuses
du Maître. Cette curieuse diatribe d’il y a deux mil ans, a-t-elle un intérêt
pour nous, les chrétiens du XXIe siècle ? Essayons de voir.
"Rendez à César ce qui est à César". Jésus n’est pas un politicien.
Il est un homme de Dieu, un maître spirituel et un prophète. Il n’est donc pas
intéressé par les manèges politiques reliés à la lutte pour le pouvoir. Pour lui
n’importe quelle autorité politique est valable, pourvu qu’elle soit humaine,
juste et préoccupée du bien-être des citoyens. Dans le cas contraire, elle n’a pas
de légitimité, ne mérite pas d’exister et doit être renversée ou remplacée.
Dans les évangiles, on voit que Jésus se soustrait régulièrement à toute
tentative de la part de ses contemporains de vouloir l’impliquer dans la course
au pouvoir ou dans des mouvements nationalistes de révolte ou d’opposition aux autorités
politiques de sont temps. L’opposition et la critique de Jésus ne vont jamais
contre les autorités civiles et laïques, mais toujours contre les autorités
religieuses de son temps. Si Jésus en veut à des catégories de personnes, ce
n’est pas aux officiers de l’occupant romain que vont ses critiques, mais vers
les membres de la hiérarchie religieuse juive qui monopolisent à leur avantage la
loi mosaïque, qui contrôlent les observances religieuses qui déterminent la
bonne ou la mauvaise qualité des personnes, leur l’intégration ou, au
contraire, leur exclusion d’une société constituée de «purs» et d’«impurs».
Il faut donc dire qu’en général
Jésus ne se mêle pas de la façon dont les politiciens structurent et gèrent la société
civile. Jésus est essentiellement un réformateur spirituel. Il pense être l’interprète
fidèle de la pensée, de la volonté, des sentiments de Dieu qu’il cherche à
faire connaître à ceux et celles qui veulent bien l’écouter. Jésus est convaincu
qu’il a une mission à accomplir parmi les hommes et que cette mission consiste
non pas à enseigner comment bâtir et diriger une société, mais comment bâtir un
homme nouveau et une existence qui soit véritablement humaine et spirituelle; et
comment orienter et diriger son cœur à travers les méandres de l’égoïsme, de la
cupidité et du mal, afin qu’il garde la candeur d’un cœur d’enfant. Jésus est apparu
parmi nous non pas pour légitimer ou justifier certaines formes de pouvoir,
mais pour raconter des rêves; communiquer des visions; indiquer des idéaux; faire
surgir des aspirations; ouvrir de nouveaux horizons; faire naître l’espérance;
susciter des élans et des désirs; allumer le feu de l’intérêt et de l’amour envers
le frère humain.
Jésus finalement nous a laissé des «valeurs» qui ont la capacité de guérir, d’améliorer et de transformer toute forme humaine et politique de pouvoir. Jésus est en effet farouchement contre toute forme de pouvoir brut, conçu comme moyen de domination et d’exploitation. Pour le Maître de Nazareth la position de pouvoir est toujours ambigüe, suspecte, dangereuse, redoutable et souvent funeste. Si en effet le pouvoir est exercé par des individus dont le cœur n’a pas été touché et changé par la grâce de Dieu, il risque de faire plus de mal que de bien à la société. Le seul pouvoir que Jésus accepte est celui du don de soi, de la disponibilité, de l’intérêt pour l’autre et du soin qui devient service de l’autre. Un pouvoir qui n’est pas service est automatiquement disqualifié. «Donnez à César ce qui est à César», certes, mais faites en sorte que vos césars soient choisis parmi les fils de lumière et non pas parmi les fils des ténèbres, qui de l’extérieur se présentent à vous comme de gentils agneaux, mais qui à l’intérieur sont des loups rapaces.
Jésus finalement nous a laissé des «valeurs» qui ont la capacité de guérir, d’améliorer et de transformer toute forme humaine et politique de pouvoir. Jésus est en effet farouchement contre toute forme de pouvoir brut, conçu comme moyen de domination et d’exploitation. Pour le Maître de Nazareth la position de pouvoir est toujours ambigüe, suspecte, dangereuse, redoutable et souvent funeste. Si en effet le pouvoir est exercé par des individus dont le cœur n’a pas été touché et changé par la grâce de Dieu, il risque de faire plus de mal que de bien à la société. Le seul pouvoir que Jésus accepte est celui du don de soi, de la disponibilité, de l’intérêt pour l’autre et du soin qui devient service de l’autre. Un pouvoir qui n’est pas service est automatiquement disqualifié. «Donnez à César ce qui est à César», certes, mais faites en sorte que vos césars soient choisis parmi les fils de lumière et non pas parmi les fils des ténèbres, qui de l’extérieur se présentent à vous comme de gentils agneaux, mais qui à l’intérieur sont des loups rapaces.
La Parole de Jésus semble nous convier à avoir avec toute
autorité une relation juste, sans se laisser écraser par les abus de pouvoir.
Savoir dire non au pouvoir de l’argent; savoir résister au pouvoir de séduction
des agences toutes puissantes de publicité et de médias qui cherchent à nous
soumettre, à nous influencer, à prendre possession de notre cerveau, à déterminer
nos décisions, à conditionner notre liberté, pour nous dominer
psychologiquement, pour créer en nous des dépendances, des besoins, des
habitudes, pour nous donner une fausse perception de ce qui est ou pas nécessaire
à notre bien-être et à notre bonheur. Se garder de la tendance à être soi-même
un César, un oppresseur un dominateur. Et aussi à agir pour que le monde soit
plus humain. L’espace est vaste où nous pouvons vivre en hommes debout et en
chrétiens disciples de Jésus.
"Rendez à César" ce qui doit lui être rendu dit Jésus, mais aussi ''rendez à Dieu ce qui est à Dieu". Avec cette phrase Jésus nous invite à quitter
le niveau de l’extérieur, du politique, du matériel, de l’immédiat, du contingent,
pour accéder au niveau supérieur du transcendent et du spirituel. Il veut nous
ramener à notre intériorité. Il nous appelle à donner hauteur et souffle à
notre humanité. Il veut nous indiquer dans quelle direction regarder pour
satisfaire nos désirs de bonheur; nos aspirations de plénitude, nos attentes d’accomplissement.
Il veut nous indiquer quel chemin parcourir pour rencontrer les valeurs qui nous
réaliseront en tant qu’humains. Il cherche à nous faire découvrir le sens et le
but de notre existence et ce qui fait la vérité de notre être.
Nous savons maintenant que nous
les humains sommes le résultat d’une longue gestation de la création. Nous
savons que nous sommes la manifestation des énergies et des forces les plus
structurantes, les plus fusionnantes et les plus aimantes qui existent dans
l’Univers. Forces qui semblent être l’expression d’une Énergie, d’un Esprit et
d’une Puissance Originelle d’attraction et d’amour à laquelle l’intuition
extraordinaire du Prophète de Nazareth a donné le nom de Dieu-Créateur, de
Dieu-Père, de Dieu-Origine, de Dieu-Source, de Dieu-Esprit, de Dieu-Lumière Éternelle,
de Dieu-Amour. Jésus a enseigné que l’être humain est fait pour dévoiler les Forces
Originelles de cet Amour divin enfouies dans la profondeur de son être et qui constituent
sa nature la plus vraie. Jésus nous révèle ainsi que le destin de l’homme est
celui de réverbérer et de répandre l’amour et d’imprégner d’amour toutes les
relations qu’il établit. Il nous apprend que l’homme est fait pour se donner
dans l’amour; qu’il est comme une source de chaleur et de lumière qui n’existe
que pour se diffuser, pour éclairer et réchauffer.
Rendre a Dieu ce qui est a Dieu signifie alors faire sortir, faire jaillir de notre cœur les forces divines de l’amour qui y sont enfermées et qui ne nous appartiennent pas, qui y ont été déposées par l’action créatrice de Dieu, afin que nous ensemencions l’univers avec ces semences de divinité.
Rendre à Dieu ce qui est à Dieu, signifie lui attribuer ce qui lui appartient; découvrir son action en toute chose; voir sa présence et l’époustouflante beauté de son visage dans la création et la nature qui nous entourent, ainsi que dans les gestes de bonté et d’amour qui surgissent avec profusion du cœur des hommes et des femmes de notre monde.
Rendre à Dieu se qui est à Dieu signifie prendre soin, caresser, communier, se passionner, s’émerveille, contempler, adorer, parler, être le cœur, la voix, le sens de tout ce qui existe. Signifie devenir pas de danse, cri de joie, chant de louange, liturgie d’action de grâce pour toute la création, lieu de la présence et de la révélation de Dieu dans notre monde.
Rendre a Dieu ce qui est a Dieu signifie alors faire sortir, faire jaillir de notre cœur les forces divines de l’amour qui y sont enfermées et qui ne nous appartiennent pas, qui y ont été déposées par l’action créatrice de Dieu, afin que nous ensemencions l’univers avec ces semences de divinité.
Rendre à Dieu ce qui est à Dieu, signifie lui attribuer ce qui lui appartient; découvrir son action en toute chose; voir sa présence et l’époustouflante beauté de son visage dans la création et la nature qui nous entourent, ainsi que dans les gestes de bonté et d’amour qui surgissent avec profusion du cœur des hommes et des femmes de notre monde.
Rendre à Dieu se qui est à Dieu signifie prendre soin, caresser, communier, se passionner, s’émerveille, contempler, adorer, parler, être le cœur, la voix, le sens de tout ce qui existe. Signifie devenir pas de danse, cri de joie, chant de louange, liturgie d’action de grâce pour toute la création, lieu de la présence et de la révélation de Dieu dans notre monde.
Rendre à Dieu ce qui est à Dieu signifie aussi et surtout prendre
soin des pauvres. Dans l’enseignement de Jésus de Nazareth les pauvres et les
démunis sont l’incarnation de la présence de Dieu dans le monde. D’après Jésus,
Dieu s’identifie avec les pauvres, les nécessiteux les mendiants, les souffrants,
les laissés pour compte, les marginaux, les délinquants, les prisonniers: « J’avais
faim, j’avais soif, j’étais nu, j’étais étranger, j’étais malade, j’étais
prisonnier… tout ce que vous avez fait à l’un des plus petits qui sont mes frères,
c’est à moi que vous l’avez fait» (Mt. 25,31-40).
Rendre a Dieu ce qui et à Dieu signifie alors rendre aux pauvres ce qui leur appartient et que nous gardons cupidement et égoïstement en notre possession. En effet, selon l’enseignement de Jésus, les biens et l’argent que nous avons accumulés, et qui constituent un excédant, un surplus et donc un luxe dont nous n’avons pas besoin pour vivre simplement et dignement, ne nous appartiennent plus, mais appartiennent aux pauvres, c’est-à-dire à ceux et celles qui sont dans le manque et qui en ont besoin pour vivre. Selon l’évangile de Jésus, le chrétien n’a pas le droit de garder pour lui le superflu dont d’autres ont besoin pour vivre. Si nous les gardons pour nous, si nous ne les donnons pas à ceux qui sont dans la pauvreté et la nécessité, nous nous transformons en des voleurs et des fraudeurs qui s’approprient abusivement du bien d’autrui.
Rendre a Dieu ce qui et à Dieu signifie alors rendre aux pauvres ce qui leur appartient et que nous gardons cupidement et égoïstement en notre possession. En effet, selon l’enseignement de Jésus, les biens et l’argent que nous avons accumulés, et qui constituent un excédant, un surplus et donc un luxe dont nous n’avons pas besoin pour vivre simplement et dignement, ne nous appartiennent plus, mais appartiennent aux pauvres, c’est-à-dire à ceux et celles qui sont dans le manque et qui en ont besoin pour vivre. Selon l’évangile de Jésus, le chrétien n’a pas le droit de garder pour lui le superflu dont d’autres ont besoin pour vivre. Si nous les gardons pour nous, si nous ne les donnons pas à ceux qui sont dans la pauvreté et la nécessité, nous nous transformons en des voleurs et des fraudeurs qui s’approprient abusivement du bien d’autrui.
Aurons-nous assez d’audace, assez de courage et
assez de foi pour réaliser dans notre vie les exigences de cette parole
d’évangile adressée à nous aujourd’hui? À nous, les chrétiens nantis, désabusés
et capitalistes de cette société nord-américaine du XXIe siècle?
Mais c’est seulement au prix de
cette audace et de cette foi que nous serons des véritables disciples du Maître
de Nazareth.
MB