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mardi 27 avril 2021

Qui, quoi conduit notre vie ?

 

( 4e dim, de pâques, B – Jn.10, 11-18) 


            L'image du bon berger appliquée à Jésus est sans aucun doute la plus connue et la plus aimée des chrétiens.

Dans l'Évangile de Jean, le comportement de Jésus, avant d'être présenté avec l'image du « bon ou beau berger », est décrit avec celle de la « porte ».  Le passage d'aujourd'hui ne nous présente que la seconde image, celle du berger, mais les deux doivent être considérées ensemble.

            La porte ne bouge pas, elle reste immobile, toujours au même endroit. Vous pouvez l'utiliser pour entrer, pour sortir et rester à l'extérieur. Lorsque vous en avez besoin, la porte vous accueille et vous protège. Vous pouvez la fermer ou la garder ouverte. Elle est toujours là pour vous. Elle est toujours là quand vous en avez besoin.

            Nous avons tous besoin de trouver des « personnes-porte » ; des personnes qui sont toujours là pour nous et que nous savons qu’elles seront toujours prêtes à nous accueillir, à nous écouter et à nous aimer, sans nous juger, ni nous condamner quoi que nous ayons fait ou nous fassions. Jésus a été ce genre de personne   Nous aussi, en tant que ses disciples, nous sommes appelés à être ou à devenir ce type d’individu qui vit avec le cœur et les bras toujours ouverts, toujours disposé à écouter, à aider, à réconforter, à encourager et à mettre débout ceux qui voudraient jeter l’éponge face aux épreuves, aux difficultés et aux souffrances de l’existence. Et cela pour qu’ils continuent de croire à la présence dans leur vie d’un Mystère d’amour qui les soutient et qui les accompagnera toujours.

            L'Évangile nous invite ensuite à être des « bergers », c'est-à-dire des gens qui « prennent soin » des autres et de toutes les créatures qui les entourent. Cette invitation arrive à point en ce temps de Covid où notre salut dépend de la capacité de chacun à faire attention, à prendre soin et à se soucier du bien-être et de la santé des tous les autres.

           Nous sommes donc appelés à être pour tous des portes et des bergers.  Nous avons tous un rôle de responsabilité, de solidarité, de guide, de prise en charge et de soin réciproque. Soit ensemble nous vivons unis, soucieux et responsables les uns des autres, soit ensemble nous périrons.

            Le moment est venu de nous poser une question : qui est le berger de notre vie ? À qui confions-nous maintenant notre existence ? Quelles sont les valeurs qui l’orientent ? Qui ou quels sont les modèles qui l’inspirent ? Est-ce le succès, le pouvoir, la célébrité, l’argent, le saccage, le pillage, le ravage de la planète pour produire plus, pour posséder plus et pour consommer à outrance … et tant pis pour les conséquences ?!? ..... Ou est-ce plutôt la disponibilité, le service, l'abnégation, l'altruisme, le respect, la gratuité et la générosité du don de soi, l'attention affectueuse et attentionnée pour nos frères humains et pour la Planète ?

            D’après vous, laquelle de ces deux attitudes rend la vie d'une personne meilleure et plus réussie aux yeux des hommes et aux yeux de Dieu ? Laquelle est la plus apte à assurer notre bien-être et notre bonheur personnels ainsi que l’avenir de notre société et de notre monde ?

            L'Évangile du bon pasteur de ce dimanche, dans lequel Jésus dit deux fois "Je donne ma vie pour mes brebis », veut donc confier à chacun de nous un message très simple mais d'une importance capitale pour la qualité de notre existence chrétienne et humaine : seulement si tu es disposé à vivre ta vie en te souciant de celle des autres, tu pourras sauver et réussir pleinement la tienne.   

 

MB –  21 avril 2021 

 

 

  

vendredi 16 avril 2021

SANS L’AUTRE ET SANS L’AMOUR NOUS NE SOMMES RIEN

 (Réflexions pour le Jeudi Saint 2021)

  

L’évangile de Jean situe les événements de ce récit au cours du dernier repas pascal de Jésus avec ses amis. Si pendant le repas le plus important, le plus solennel et le plus chargé de souvenirs et de symbolisme du rituel religieux juif, Jésus a pris l’initiative de laver les pieds à ses disciples, c’est qu’il a voulu remplacer l’ancienne symbolique (libératrice et triomphale) de ce repas par la symbolique de ce geste d’humilité et d’abaissement. Et cela afin de graver pour toujours dans l’esprit et le cœur de ses disciples un principe de vie et de conduite humaine qui lui tenait particulièrement à cœur, parce qu’il constituait le centre et l’essentiel de tout son message : la nécessité d’incarner dans leur vie les dynamiques amoureuses du comportement de Dieu, par lesquelles chacun devient capable de se décentrer de lui-même et de vivre dans une disposition constante de don de soi et de service.

Jésus là, par terre, en train de laver les pieds de ses amis, devient le prototype du comportement de chaque disciple. Dans ce geste, le premier devient le dernier, le grand se fait petit, celui qui commande devient celui qui sert. Oui, aux yeux du monde, cela est un comportement fou, insensé, hors norme. Mais aux yeux de Jésus cela devient désormais (ou devrait devenir) l’attitude normale de ses disciples : « Je vous ai donné l’exemple, - leur dira-t-il - moi, que vous appelez Maitre et Seigneur, afin que vous fassiez de même ».

 Par ce geste Jésus trace aux siens un nouveau programme de vie : non plus une existence centrée et repliée sur soi-même, dans la recherche obsessive, exclusive et égoïste de son bien-être personnel, de ses intérêts, de ses désirs, de ses convoitises, mais une vie donnée au service des autres (surtout s’ils sont démunis, souffrants, abandonnés, opprimés) et dépensée à mettre plus d’amour, à créer plus de fraternité et à produire plus de bonheur dans notre société et dans notre monde.

 Par ce geste d’abaissement, posé à la veille de sa mort, Jésus veut nous transmettre son héritage le plus précieux :  nous faire comprendre que seulement l’amour de l’autre accomplira notre vie et sauvera le monde. Il veut que nous prenions conscience de l’importance de l’autre dans notre existence. Car l’autre est le seul à rendre possible l’amour dans notre vie et donc, par le fait même, le déploiement et la réalisation de notre humanité, de notre bonheur, ainsi que le sens de notre existence. Sans l’autre et sans l’amour, nous ne sommes rien, disait Paul aux Corinthiens.

 Cette sortie de nous-mêmes pour rencontrer l’autre dans le but de l’aimer pour ce qu’il est, pour l’aimer sans conditions, qualifie non seulement le comportement chrétien, mais est aussi à la base d’un comportement authentiquement humain. Sans l’amour nous ne sommes plus des humains, mais nous nous déshumanisons. 

La personne qui aime permet de donner sens à tout ce qui vit. Aimer l’autre, que ce soit un être humain ou un quelconque représentant de la famille des vivants, c’est lui donner une raison de vivre. Pour un être, il n’y a, en effet, aucune raison d'exister. L'existence est pure gratuité. Mais aimer l’autre, signifie vouloir que l’autre existe. C’est donc l’amour qui le rend valable, important et nécessaire. Aimer une personne, c’est lui dire « tu ne mourras jamais en moi ; tu dois exister ; tu comptes ; le monde serait un endroit triste et inachevé sans toi ; le monde est plus beau, ma vie plus heureuse grâce à ta présence…»

Lorsque quelqu'un ou quelque chose deviennent importants pour l'autre, survient en celui-ci un jaillissement d’énergies vitales. C’est pour cela que lorsqu’on aime on   rajeunit et on a la sensation de commencer une nouvelle existence dans un monde qui, subitement et par enchantement, est devenu « merveilleux ». L'amour est éclatement de vie et une sublime source de joie, de ravissement et de bonheur. 

Les nouvelles consignes et la nouvelle orientation de vie que Jésus nous laisse en héritage constituent alors la négation de toutes relations qui s’instaurent selon les paramètres et la logique du pouvoir et de la supériorité des uns sur les autres ; ainsi que la condamnation de tous comportements et attitudes égoïstes et prédatrices qui se développent à l’opposé du chemin de la responsabilité, du soin, du respect, de l’égard, de l’attention amoureuse pour le monde humain et pour le monde naturel. 

Le génie et l’originalité de Jésus consistent dans le fait d’avoir compris que les humains se trouvent bien mieux nantis et bien plus heureux dans un monde (ou une société) conduit par les forces et les attitudes de l’amour, de la compassion et du service, que par celles du pouvoir, de la violence et de l’oppression. De sorte que, pour Jésus, l’humanité aura accomplie un énorme saut évolutif lorsqu’elle aura intégré dans ses convictions et ses pratiques la valeur de la disponibilité, du service et de l’amour gratuit et désintéressé des uns pour les l’autres. 

 En ce Jeudi Saint les chrétiens sont donc invités à parcourir à leur tour la route sur laquelle Jésus a marché et à assimiler dans leur vie les attitudes intérieures qui ont fait de lui le bon pain qu’il a été pour tous. «Je vous ai donné l’exemple, nous dit-il encore ce soir, afin que vous vous  aimiez les uns les autres comme je vous ai aimé ».

 

Je pense que la réalisation de ce modèle d’amour et de service constitue, pour les humains d’aujourd’hui, la seule façon de s’accomplir et de sauver le monde qu’ils habitent.

 

 

 

M B