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dimanche 14 décembre 2014

DÉPASSER LES RELIGIONS ET RETROUVER LA SPIRITUALITÉ


1. NAISSANCE DE LA RELIGION

Pendant presque deux mille ans le christianisme a modelé l’histoire, la culture, les lois, les mœurs, les mentalités et les croyances de l’Occident. Actuellement ce même Occident (surtout l’Europe et Amérique du Nord), après tant de siècles de vie commune, est en train, un peu partout, de divorcer de ce même christianisme qui l’a pourtant structuré. Il s’agit d’une crise de la religion chrétienne sans précédents. Et il est presque certain, qu’avec le temps, cette crise affectera aussi les autres régions et les autres religions du globe. En effet, cette crise ne semble pas être typique à l’Occident ou un phénomène qui serait propre à la religion chrétienne. Aujourd’hui on est plutôt porté à penser que cette morosité vis-à-vis du christianisme soit plutôt un phénomène lié à la «nature» même des «religions» en tant que telles et de leur incapacité à s’adapter aux profonds changements culturels en cours dans notre société moderne. On se trouve devant une transformation socioculturelle tellement radicale, globale et profonde, que le monde moderne ne semble plus capable d’accueillir dans ses valeurs et d’intégrer dans ses paradigmes culturels les contenus «néolithiques» des religions.

En Occident pendant longtemps le croyant ordinaire a pensé que la religion chrétienne était d’origine divine et qu’au nom de Dieu elle proposait tout un système de doctrines, de croyances, de comportements et de rites auxquels il fallait obligatoirement adhérer pour vivre une existence humaine convenable et pour réaliser son salut. Il faut reconnaître que cette façon de comprendre la religion chrétienne de la part des fideles a été encouragée et soutenue par les autorités religieuses elles mêmes, lesquelles se sont autoproclamées représentantes de Dieu et ont imposé leurs dogmes et leurs doctrines comme étant des vérités révélées par Dieu exigeant une acceptation inconditionnée.

Aujourd’hui l’anthropologie culturelle qui étudie les mœurs, la religion et les autres aspects symboliques des sociétés humaines, nous a appris que les religions ne sont pas des institutions qui ont toujours existées, mais des phénomènes relativement récents dans l’histoire de l’humanité. Elles ne viennent donc pas de Dieu, mais elles sont des créations et des inventions humaines. Elles ont pris naissance à l’époque du néolithique (entre 10 000 - 4000 ans avant notre ère), lorsque l’espèce humaine est passée de la vie nomade dédiée à la chasse et à la cueillette, à une existence plus sédentaire et à une organisation sociale de type tribale, vivant d’agriculture et d’élevage et apte à des réalisations qui dépassaient le stricte cadre de l’autosuffisance. A cette époque la relation entre population et environnement ne se posait plus en termes d’adaptation au milieu naturel, mais en termes de contrôle de la société primitive elle-même. Dans la nouvelle société sédentaire et agricole, la propriété, les inégalités, les contrastes, les collisions devenaient possibles et donc de nouvelles règles sociales et de nouvelles valeurs s’imposaient. Il fallait donc inventer les modalités et les règles d’une vie commune partagée et pacifique.

L’humanité, en ce moment crucial de son histoire évolutive, s’est trouvée dans la nécessité d’élaborer et de se donner des codes et des normes de comportement destinés à assurer la cohésion et donc la possibilité d’une vie collective et sociale ordonnée et pacifique. La vie sédentaire a permis à ces cultivateurs d’entrer en contact plus direct et plus personnel avec la nature et les forces magiques qui l’animaient. L’énergie qui chauffait le soleil, qui allumait la lune, qui faisait briller les étoiles dans le ciel nocturne, germer les graines, éclore les fleurs, pousser les arbres, courir la rivière, engendrer les veaux et les agneaux … cette énergie constituait pour eux un phénomène mystérieux et une source continuelle de crainte et de stupéfaction.

Vivant dans un environnement naturel souvent rude et hostile qui ne leur permettait de vivre et de se nourrir qu’au prix de beaucoup de labeurs et de peines, les gens du néolithique sentirent vite le besoin d’une aide et d’une protection qui leur viendraient d’en haut. Ils pensèrent qu’une conduite bonne et pieuse de leur part, accompagnée de prières, de supplications, d’offrandes et de sacrifices offerts aux divinités ou aux esprits, pouvait être un moyen efficace de les apprivoiser et de les induire à regarder vers les humains d’un œil propice et bénévole. Ils se convainquirent que les prières et les sacrifices pouvaient rendre plus féconds leurs troupeaux; plus fertile le sol; plus abondantes les récoltes et éloigner les calamités naturelles qui les détruisaient. Ainsi la nécessité, la fragilité, la peur, mais aussi la fascination, le sentiment de crainte, d’émerveillement, de reconnaissance et d’adoration devant les puissances mystérieuses  et surnaturelles à l’œuvre dans le monde, furent des facteurs déterminants dans la formation des attitudes intérieures qui conduisirent, à cette époque de l’évolution humaine, à la naissance du phénomène des religions. Il a fallu sans doute l’intervention de personnalités particulièrement influentes ou charismatiques (chefs, sages, chamans, sorciers, guérisseurs…) pour canaliser et «structurer» toutes ces pulsions intérieures en un ensemble théorique, pratique, directif et cultuel qui constitue le noyau de toute religion.

Pour éviter toute confusion, dans cet article nous utiliserons le terme de «religion» dans le sens de «structure» ou de configuration sociale-institutionnalisée que l’homme du néolithique, suivant son penchant religieux-spirituel, a inventé et adopté comme système opératif de base pour contrôler et faire fonctionner la société agraire dans laquelle il vivait.

            Depuis le néolithique jusqu’à nos jours, les sociétés humaines ont été religieuses. La religion-institution a modelé et pétri toute les expressions de la vie sociale, politique, culturelle, spirituelle et privée des personnes. «La culture a été la forme de la religion et la religion a été l’âme de la culture» (Tillich). Les religions ont été le software qui a permis aux sociétés de fonctionner, en fournissant aux personnes une vision de la réalité et une finalité existentielle.

Les religions, dans le sens qu’on leur donne ici, sont donc des phénomènes historiques, des formes socioculturelles concrètes dans lesquelles la capacité spirituelle de l’être humain s’est exprimée en une époque déterminée. Elles sont donc des phénomènes historiques qui ne durent pas pour toujours. Elles peuvent disparaître. Comme tout événement historique, elles sont contingentes, changeantes et transitoires. Les religions n’ont pas toujours existé et il n’est donc pas nécessaire qu’elles existent.      

2. RELIGIONS, RELIGIOSITÉ ET SPIRITUALITÉ

L’humanité a vécu la plus grande partie de son existence sans aucune religion structurée (le paléolithique ne présente pas trace de religions). Les religions ne sont pas indispensables au développement de notre nature humaine et de notre spiritualité, même si au cours de notre longue évolution elles nous ont accompagnés pendant quelque temps de leurs bons services. Les religions, avec leurs croyances, leurs dogmes, leurs mythes, leurs rites, leur morale, leurs contraintes, leurs obligations et leurs impositions, ne sont pas un chemin obligatoire et nécessaire de salut.

La religion n’est pas à confondre avec la «religiosité» et «la spiritualité» qui sont des dimensions constitutives essentielles et permanentes de l’être humain. On a toujours pensé que les religions détenaient le monopole de la spiritualité et qu’une personne ne pouvait avoir une qualité de vie spirituelle que grâce à la religion; et qu’être religieux et être spirituel était la même chose. Avant de continuer avec notre exposé, il est peut-être utile d’apporter une clarification à propos des notions de religiosité et de spiritualité.

La religiosité est l’attitude de la personne à s’intéresser au monde du divin, du transcendent et à se laisser affecter par les croyances qui s’y attachent. Cette religiosité surgit comme la conséquence de la prise de conscience de la part de l’homme de sa non-nécessité, de sa fragilité foncière et du caractère transitoire et éphémère de son existence. La religiosité naît donc comme un besoin de l’homme de trouver une raison et une justification à sa présence en ce monde perçu comme différent et souvent hostile, ainsi  qu’un accueil inconditionnel à son existence de la part d’une Entité Supérieure ou d’une Divinité conçue comme un Être fondamentalement bénévole er bien disposé envers l’homme. La religiosité cherche à établir les conditions intérieures qui assurent à la personne stabilité et équilibre psychologique, ainsi qu’un sentiment de sécurité existentielle, grâce à l’ouverture sur la transcendance facilitée par l’adhésion à des croyances et la pratique de rites fournis par la religion-institution.

La spiritualité, par contre, se présente comme un ensemble de dispositions de la personne qui la sollicitent à entreprendre le voyage à l’intérieur d’elle-même, dans le but de mieux comprendre la nature de son être, de saisir le sens de sa présence dans le monde, de recomposer sa vie d’après le modèle d’humanité ou les valeurs qu’elle a trouvées au fond d’elle-même. La spiritualité est donc ce qui permet à l’homme d’arriver à la découverte de l’esprit en lui. Au cours de cette expérience d’intériorité, l’individu “spirituel” est souvent confronté à une Réalité qui le dépasse et à laquelle il donne habituellement le nom de Dieu. La spiritualité est donc une sensibilité accrue de l’homme à la présence de l’esprit de Dieu, perçu comme Énergie originelle structurante partout à l’œuvre: dans l’Univers, dans la nature et dans les profondeurs de l’être humain.

Les religions, dans le sens technique du mot que nous avons établi au début (phénomène humain et historique né à l’époque du néolithique pour construire pacifiquement la vie des tribus primitives devenues sédentaires et agricoles), ne sont en soi ni source de religiosité ni source de spiritualité. L’étude du christianisme en Occident montre que la religion chrétienne a presque toujours été un frein et un obstacle à la religiosité et à spiritualité. Car la religion, en tant que telle, n’est pas intéressée à porter Dieu à l’homme afin que celui-ci puisse devenir un être plus humain, plus religieux et plus spirituel. La religion-institution cherche principalement et fondamentalement à obtenir de l’homme, (en exploitant l’idée de Dieu qu’elle a élaborée et imposée) les attitudes intérieures de soumission à son autorité et les comportements extérieurs d’acceptation inconditionnée de ses directives et de ses dogmes, dans le but d’assurer la permanence de son pouvoir et la sauvegarde de l’ordre établi dans la société.

Bien que la mentalité populaire soit souvent portée à confondre la spiritualité avec la religion ou avec les pratiques et les attitudes religieuses, en réalité la spiritualité se situe aux antipodes de la religion. La spiritualité s’accomplit sur le plan de la subjectivité et de l’intériorité, la religion se réalise sur celui de l’objectivation et de l’extériorité. Dans la religion Dieu est à l’origine de l’homme; dans la spiritualité l’homme est à l’origine de Dieu. Dans la spiritualité Dieu se révèle à l’homme de l’intérieur; dans la religion Dieu se «révèle» à l’homme de l’extérieur. Dans la spiritualité, c’est l’homme lui-même qui découvre Dieu ou qui postule l’existence de Dieu au terme d’un laborieux processus de prise de conscience du potentiel spirituel renfermé au “centre” de son être. Dans la religion Dieu est enseigné, proposé et imposé comme une «vérité» à croire ou comme réalité extérieure à laquelle le fidèle doit obligatoirement se relier et qu’il doit nécessairement accepter. Dans la spiritualité l’homme tombe dans les bras de Dieu sans presque se rendre compte de l’identité de Celui qui l’enlace. Dans la religion Dieu est donné à l’homme comme un bien qui va de soi et que l’homme doit chercher à conserver. Dans la spiritualité, Dieu est découvert dans la stupéfaction, l’émerveillement et le ravissement d’un esprit intelligent qui ne trouve pas en lui la justification du potentiel spirituel dont il est gratifié. Dans la religion, Dieu est sans surprise; il est possédé comme un produit largement commercialisé et comme le résultat de pratiques et de rites infailliblement efficaces. Dans la spiritualité on ne trouve Dieu qu’au bout d’un long travail de construction et d’unification de sa propre humanité (une humanité souvent divisée entre le désir du bien et l’attrait du mal, entre l’être et l’avoir, entre l’authenticité et le paraître, entre la liberté et le devoir, etc.). Dans les religions la quête et la possession de Dieu sont souvent au prix de la destruction et de la “mortification” de la nature humaine. Alors que les religions affirment qu’il est nécessaire que l’homme meure pour voir Dieu; la spiritualité soutient que l’homme ne devient la révélation la plus parfaite et la plus saisissante de la présence de Dieu dans l’univers que lorsqu’il réussit à vivre à plein les exigences authentiques de son humanité. Alors que la religion affirme que l’homme abdique à sa dignité lorsqu’il écoute les pulsions de sa nature; la spiritualité soutient, au contraire, que ce n’est que lorsqu’il vit pleinement en homme qu’il devient la meilleure icône de la divinité.

Les religions, en tant qu’institutions humaines qui assurent leur existence par l’imposition et la soumission à des dogmes, des doctrines, des rites et des pratiques extérieures, n’ont évidemment aucun intérêt à encourager chez leurs fidèles une recherche de Dieu qui se ferait sans leur intermédiaire. Les religions, à cause justement de leur nature et des intérêts matériels en jeu, peuvent difficilement être en faveur de la spiritualité. Ainsi, en décourageant le voyage de l’homme vers son intériorité, s’opposent-elles à la spiritualité et deviennent paradoxalement les ennemis de l’esprit. L’histoire nous montre, avec une régularité surprenante, que les religions instituées n’ont jamais eu beaucoup de sympathie pour les spirituels et les mystiques, qu’elles ont souvent critiqués, écartés, ignorés et parfois condamnés. Sur ce point on ne peut que donner raison à Friedrich Nietzsche (Ainsi parlait Zarathoustra) lorsqu’il affirme que les religions ne sont ni humaines ni spirituelles. Il n’est donc pas osé de conclure que la religion éloigne l’homme de la spiritualité et que l’homme ne peut être spirituel que s’il renonce à être un adepte de la religion.

3. CRISE DE LA RELIGION CHRÉTIENNE EN OCCIDENT

L’absolutisation de la religion que nous avons pendant longtemps connue en Occident, fait désormais partie du passé. Les générations de notre temps, élevées dans une nouvelle culture, enrichies de nouvelles connaissances, dotées d’une nouvelle mentalité, instruites dans les acquis des sciences modernes, ont perdu la naïveté des générations incultes d’antan, ainsi que l’ingénuité de croire au caractère divin, permanent, absolu, autoritaire, directif des religions. Si, dans le passé, les religions ont rendu parfois plus facile et plus soumise la vie des humains, aujourd’hui elles apparaissent comme anachroniques et les contenus de leurs dogmes et de leurs doctrines comme des fossiles sans valeur et sans utilité provenant d’un temps à tout jamais révolu.

Si les religions sont des constructions humaines occasionnées par la nécessité de résoudre des problèmes concrets de relations humaines et de vie communautaire au sein des sociétés primitives et par le besoin d’expliquer la réalité, cela donne alors à nous aussi le droit et la liberté de ne pas nous sentir ni liés ni dépendants de ces anciennes structures organisatrices et interprétatives. Cela donne à nous aussi le droit d’apporter nos propres réponses aux problèmes de l’existence et de fournir notre propre interprétation de la Réalité, soutenus par la richesse des nos connaissances et par l’apport des acquis des nouvelles découvertes scientifiques et cosmologiques de l’époque moderne.

Si l’on garde présent à l’esprit le fait que les religions sont des créations humaines et qu’elles se sont bâties en introduisant dans leur structure les connaissances, les mythes, la vision cosmologique, les problématiques et les questions existentielles propres aux gens du néolithique; si l’on considère aussi que les religions ont pratiquement conservé intacts, le long des millénaires et jusqu'à nos jours leurs anciens contenus, leurs mythes, leurs connaissances rudimentaires et leurs croyances naïves et primitives, on peut facilement comprendre l’énorme décalage culturel et l’ampleur de la scission mentale qui existe entre notre monde hypercultivé et hyper scientifique et ce monde archaïque totalement périmé. Notre société n’est plus celle du néolithique et donc le «système opératif» qui a permis à la société agraire d’il y a dix mille ans de fonctionner, n’est plus compatible avec celui qui fait marcher nos société modernes. Cela explique pourquoi les religions traditionnelles n’ont plus aucune prise sur les mentalités modernes En effet, les problèmes que ces anciennes religions ont cherché à résoudre et pour la solution desquels elles sont nées, ne correspondent plus aux questionnements, aux problématiques et aux intérêts de gens d’aujourd’hui. Ces religions issues du néolithique n’ont plus aucun raison d’être. Elles devraient donc disparaître ou elles devraient totalement se réinventer.

Dans le mode Occidental, la désaffection moderne vis-à-vis des religions en général et de la religion chrétienne et catholique en particulier, n’est donc pas causée par la sécularisation ou la laïcisation des institutions et des sociétés, ni par la perte des valeurs, ni par des attitudes matérialistes et hédonistes (comme se plaît à affirmer un certain discours ecclésiastique culpabilisant), ni par le manque de véritables témoins, ni par les scandales des hommes de religion, mais par l’apparition d’une nouvelle situation culturelle qui comporte une transformation radicale des structures cognitives et interprétatives et d’un sens critique très développé.
Pour ne s’en tenir qu’à la religion chrétienne qui a marqué la culture de l’Occident, voici une liste d’affirmations de base que cette religion a héritée du passé et qu’elle continue cependant à proposer et à imposer, mais qui ne pourront plus jamais être acceptées par les gens de la modernité.
Vision mythique du monde: géocentrisme, anthropocentrisme.
L’inspiration divine des textes fondateurs de la religion judéo-chrétienne (la Bible). Textes considérés comme contenant la parole même de Dieu, directement dictée ou inspirée par Lui aux écrivains humains qui les ont rédigés. Textes contenant donc une vérité absolue, incontestée et incontestable.
Compréhension dualiste de la réalité.
Conception anthropomorphique de la divinité (un dieu là-haut et en dehors de notre monde).
Création directe d’un couple humain originel.
Chute, faute et «péché originel» de la part du premier couple humain.
Contamination, corruption et dégradation foncières de la réalité matérielle en général et de la race humaine en particulier à cause du péché originel.
Nécessite d’une restauration, d’une réparation, d’une expiation, d’un rachat, d’une «rédemption» pour réintégrer le monde et l’humanité déchus dans les grâces de la divinité.
Intervention directe de Dieu dans notre monde (sur notre planète) pour effectuer la «réparation».
Incarnation historique, physique et réelle de Dieu dans un homme juif de Palestine (Jésus de Nazareth), né d’une mère restée vierge avant et après l’accouchement. Cette incarnation de Dieu s’est effectuée sous le règne de l’empereur romain César Auguste, mort en l’an 14 p.c.
Jésus de Nazareth, incarnation de Dieu est l’instrument divin de cette «réparation» ou de cette rédemption; et cela à cause des souffrances qu’il a endurées au cours de son exécution sur une croix.
La mort de Jésus en croix considérée comme sacrifice d’expiation planifié et voulu par Dieu. Croyance que la souffrance du Dieu incarné a réalisé la rédemption du monde et que c’est désormais par la souffrance que les humains s’affranchissent du mal, obtiennent le pardon, la réconciliation divine, leur sanctification et leur salut éternel.
Croyance que puisque Jésus est l’Incarnation de Dieu sur terre («le Fils de Dieu » et la deuxième personne de la Trinité») et que Dieu est Tout-Puissant, rien n’est à son épreuve et au-delà de ses pouvoirs divins. Il peut faire tout ce qu’il veut, même aller contre les lois de la nature. Il peut donc accomplir des «miracles» et «ressusciter» après sa mort.
Croyance que Jésus, l’Incarnation historique et ontologique de Dieu, a voulu fonder une religion (l’Église), aux représentants officiels de laquelle (mais surtout au Pape de Rome) il a transmis ses pouvoirs et son autorité pour qu’ils agissent en son nom et continuent son œuvre et sa mission sur la terre.
Croyance que le Dieu incarné en Jésus guide, soutient et assiste continuellement les autorités de la religion qu’il a fondée pour lui assurer pérennité, efficacité, prestige et infaillibilité.
Croyance que les officialités (pape et évêques) de cette religion du Dieu incarné sont gratifiées d’une illumination et d’une inspiration spéciale de la part de l’«esprit saint» de Dieu, qui les habilite à connaître la volonté de Dieu et à savoir, en toutes circonstances et sur toutes les questions, ce que Dieu désire, veut et pense. Dans cette religion du Dieu incarné, le doute n’a pas de place, car tout est certitude.
Croyance qu’ayant été fondée et donc voulue par Dieu, la religion chrétienne est la seule à être d’origine divine et qu’elle est donc supérieure à toutes les autres religions du monde.
Croyance que la religion chrétienne, étant la seule à être d’origine divine, est aussi la seule à être vraie et la seule à détenir la vérité sur Dieu, sur l’homme et sur le monde. Il s’ensuit que toutes les autres grandes religions sont fausses et qu’elles doivent soit disparaître soit se convertir à la «vraie» religion.
Croyance que la religion chrétienne est l’unique «lieu» où l’homme peut faire la rencontre du vrai Dieu et de la «vérité»; et que l’appartenance à l’Église est donc le seul moyen ou la seule voie donnée à l’homme pour réaliser son salut.
Croyance que l’Église a le droit et le devoir sacré de tout mettre en œuvre pour se répandre et s’imposer partout dans le monde, dans le but de faire entrer dans son giron le plus grand nombre possible de croyants, afin de sauver leurs âmes de la damnation éternelle.
La croyance que (puisqu’elle détient la vérité et qu’elle est continuellement et directement assistée par Dieu afin qu’elle ne se trompe jamais dans ses directives et son enseignement) l’Église a l’autorité et le droit de se mêler de toutes les questions concernant la conduite des humains pour qu’elle soit «vertueuse» et «morale» (surtout dans leur vie amoureuse et sexuelle) et d’intervenir pour leur indiquer et leur imposer les exigences de la volonté de Dieu.
La croyance de l’Église en l’incarnation historique de Dieu, jumelée à la croyance d’être née d’une volonté explicite d’un Dieu incarné, est à l’origine du pouvoir absolu que celle-ci croit détenir sur les âmes, les consciences de ses fidèles. Elle pense participer à l’autorité absolue de Dieu qu’elle seule représente sur terre.
La croyance en une incarnation de Dieu, dont les virtualités et les pouvoirs ont été confiées à l’Église, combinée avec la croyance en une Église porteuse de l’unique vérité et de l’unique salut de Dieu, sont à l’origine des pires expressions de la culture chrétienne de l’Occident. Ces croyances ont justifié les croisades, les guerres de religions, l’Inquisition, l’impérialisme et le colonialisme des nations chrétiennes, l’absolutisme et la tyrannie du pouvoir clérical, le prosélytisme et le fanatisme missionnaire, l’antisémitisme, la dépréciation et le rabaissement de la femme.
La croyance en l’incarnation historique et ontologique de Dieu dans l’homme-Jésus constitue le fondement sur lequel est construite toute la structure de la religion chrétienne: sa hiérarchie, son pouvoir, son autorité, ses doctrines, sa spiritualité et ses rites. On peut affirmer que si les autorités ecclésiastiques ont fait de l’incarnation de Dieu en Jésus le dogme de base de la foi chrétienne et l’axe autour duquel tourne toute la roue de la dynamique ecclésiale, c’est principalement parce que ce dogme constituait finalement le fondement et la justification ultime de leur pouvoir. En vertu de ce dogme, les représentants de la hiérarchie religieuse pouvaient se vanter de posséder un pouvoir qui ne leur venait pas des hommes, mais de Dieu lui-même. Dans ce dogme ils trouvaient l’absolutisation de leur autorité et la divinisation de leurs fonctions et de leur pouvoir.
Cependant, si cette incarnation de Dieu, telle que comprise, interprétée et formulée par la tradition chrétienne, s’avère impossible et inacceptable à la mentalité moderne, alors c’est toute la construction de la religion chrétienne qui perd ses assises et sa crédibilité et qui finira tôt ou tard par s’écrouler comme un château de cartes.

4. TOUTES LES RELIGIONS SONT VRAIES ET FAUSSES

Les remarques critiques que nous venons d’adresser ici à la religion chrétienne, mutatis mutandis, peuvent aussi, en grande partie être appliqués aux autres grandes religions de l’humanité (Judaïsme, Hindouisme, Islam, etc.). En effet, c’est le propre d’une religion (et d’une foi religieuse) de se croire absolue et insurpassable, de se concevoir comme la seule vraie religion voulue et inspirée par Dieu et comme la seule à détenir la vérité et les bons moyens du salut. En conséquence de cela, chaque religion considère les autres comme professant des croyances imparfaites, incomplètes et même fausses. Il est normal que tout croyant soit convaincu que le contenu de sa foi corresponde à la vérité et non pas à une illusion ou à un mensonge.
Par cela nous ne voulons pas affirmer que toutes les religions sont du pareil au même et qu'elles ont perdu leur fonction ou leur utilité. Les humains, en effet, auront toujours besoin d’être soutenus et guidés par des «professionnels» dans leur quête de sens, de Dieu, de spiritualité et d’humanité. Il faudra toutefois que les religions parlent préférablement le langage des hommes auxquels elles s’adressent si elles veulent être écoutées. Il faudra qu’elles épousent continuellement le temps historique et culturel dans lequel elles se manifestent. Il faudra qu’elles réinterprètent et réélaborent de fond en comble tout leur patrimoine symbolique reçu du passé. Dans le cas de la religion chrétienne, il faudra aussi qu’elle renonce à sa prétention de supériorité par rapport aux autres religions et à son statut de vieille forteresse fermée sur elle-même, toujours en train de se battre pour défendre ses remparts. Il faudra qu’elle accepte de se transformer en une auberge toujours ouverte sur la route des hommes de son temps; ouverte à leur mentalité, à leur culture, à leurs connaissances, à leurs découvertes, à leurs aspirations, à leurs problèmes, afin qu’ils puissent trouver en elle les attitudes d’accueil, d’empathie, de sympathie qu’ils attendent; ainsi que des réponses acceptables à leurs questionnements, à leurs élans et à leur rêves. Mais il faudra que ses réponses s’appuient sur des arguments que les gens de la modernité peuvent facilement comprendre, accepter et intégrer au bagage de leur culture, de leurs convictions, de leurs connaissances et de leur mentalité pluraliste et multiculturelle. Il faudra en finir avec les mythes, les contes, les sagas et les épopées interprétés et proposés toujours et encore par la religion comme des faits réels ou comme des événements historiques qui les vident de leur richesse naturelle, de leur sens profond, de leur beauté impérissable et de leur vérité toujours actuelle.
La Réalité Ultime (le Fondement de l’Être, de la Vie et de l’Amour) est telle qu’elle n’existe que pour influencer impartialement tout ce qui existe et pour se faire «appréhender» sans préférences ni exclusivismes par tout ce qui existe. Elle n’exclut personne de son action et elle ne privilégie personne. Il n’y a donc pas de religions qui reçoivent davantage de Dieu; qui soient supérieures ou meilleures que les autres; qui possèdent un meilleur accès à sa vérité ou un traitement de faveur de la part de Dieu en ce qui concerne les moyens du salut. La Réalité Ultime, que nous appelons Dieu, est à l’œuvre depuis toujours dans le cœur de tous les humains afin de les éveiller à l‘attrait de sa présence et pour les transformer en relais de son Amour. Cela se passe autant dans les religions qu'en dehors d’elles. Il est donc faux de penser que l’esprit de Dieu n’a commencé à agir dans notre monde qu’avec la venue de Jésus de Nazareth et la fondation de la religion chrétienne, laquelle serait le «chouchou» de Dieu.

Le christianisme, à cause de sa croyance en l’incarnation de Dieu dans la personne de son Fondateur avance la prétention d’être la «meilleure» religion du monde. Si cette prétention était vraie, le christianisme devrait nécessairement produire les «meilleurs» fruits. Il devrait, par conséquent, produire les meilleures personnes, la meilleure civilisation, la meilleure société. Et cette «qualité supérieure» d’humanité devrait être visible et constatable tout au long des deux milles ans de son histoire. L’Occident, formé et moulé par la religion chrétienne devrait être le berceau des meilleurs institutions humaines, des meilleurs peuples, des meilleurs gouvernements et nations. Est-ce vraiment le cas? Lorsqu’on regarde le capitalisme ravageur et déprédateur dans lequel beigne l’Occident actuel et lorsqu’on voit toutes les horreurs et toutes les atrocités perpétrées dans le passé au nom de la foi et de la religion chrétienne, on est forcé de conclure que la prétention d’excellence et de supériorité avancé par la religion chrétienne est une absurdité.

Cela nous amène à affirmer que, finalement, toutes les religions sont autant vraies que fausses. Et qu’il n’y a aucune religion de laquelle on puisse dire qu’elle détient les meilleurs instruments de perfectionnement spirituel et humain ou les meilleures opportunités de salut qu’une autre. Il n’y a pas de religion parfaite, car toute sont imparfaites. Toutes détiennent une partie de vérité et une partie d’erreurs. Elles sont donc appelées à dialoguer, à vivre dans la complémentarité et à partager les unes avec les autres les fragments de vérités qu’elles possèdent. Le dialogue entre les religions sera peut-être un jour le signe le plus important du progrès accompli par nos sociétés modernes et par l’esprit de l’homme contemporain. Le monde aura avancé à pas de géant vers une forme beaucoup plus évoluée de solidarité, de communauté et d’humanité lorsque les religions auront cessé d’être des causes de séparation, de division, de haine, de souffrance et de conflits, pour devenir des facteurs d’unité, de paix, de partage et de fraternité entre les peuples de la terre .
Cette fondamentale équivalence des religions est facilement compréhensible si l’on considère que celles-ci ne sont autre chose que des expressions historiques et culturelles de la quête de Dieu par les êtres humains le long de leur l’histoire. Elles surgissent comme des phénomènes naturels et spontanés à travers lesquels la présence de la Réalité Ultime qui anime et fermente l’Univers cherche à se dire et à se révéler dans ce monde et particulièrement dans l’être humain, matière devenue consciente et spirituelle. Chaque religion est, à sa façon, une réponse différente, mais valable à la Réalité Ultime qu’on appelle Dieu. Mais puisque la Réalité Ultime est par nature indéfinissable et qu’elle dépasse les capacités de l’intelligence humaine, il s’ensuit que les concepts, les images, les symboles, les doctrines, les formulations, le langage avec lesquels les humains, dans leurs cultures, dans leurs religions et dans leur rites, cherchent à exprimer le Mystère Ineffable qui les entoure et les habite, sont nécessairement des bégaiements limités, partiels, incomplets, boiteux, défectueux, contenant des éclairs lumineux de vérité, mais aussi de vastes zones d’ombres remplies d’extravagances et de faussetés.

5. TOUTES LES RELIGIONS SONT PORTEUSES DE SALUT
La quête de Dieu de la part de l’homme est antérieure à la naissance des religions. La quête de Dieu est une caractéristique de l’esprit de l’homme qui s’éveille à la conscience et à l’intelligence de la Réalité Originelle, qu’on appelle ordinairement «Dieu». C’est cette recherche de Dieu de la part d l’homme qui fait en sorte que celui-ci soit considéré comme un être spirituel et donc comme possédant une «spiritualité». C’est parce que, dans le passé, on a toujours confondu spiritualité et religion, que l’on a attribué à la religion le but de chercher Dieu. Alors que la finalité de la religion est seulement d’«organiser» ou d’«orchestrer» extérieurement et rituellement les élans des chercheurs de Dieu. Il est certain qu’habituellement ces «spirituels» vivent encadrés dans une structure religieuse et que le contexte religieux peut les aider à vivre leur spiritualité. Mais ce n’est pas nécessairement le cas. L’essentiel de la quête de Dieu de la part de ces personnes éprises de spiritualité consiste dans la réalisation de leur désir d’entrer dans une forme de proximité, de relation profonde et même d’union réelle avec la Réalité Ultime. Ces «spirituels» sont en effet convaincus, qu’au contact avec la Réalité de Dieu, ils pourront se sentir positivement affectés et donc transformées en des meilleures personnes, jouissant d’un supplément ou d’un accroissement de sens, de bonheur et d’humanité.

Le projet spirituel de ces chercheurs de Dieu consiste finalement à se décentrer de soi-même pour mieux se centrer sur Dieu et en Dieu. Et c’est dans ce mouvement intérieur et existentiel de sortie et d’abandon de soi pour aller vers l’Autre et pour accueillir la Réalité de l’Autre, que l’homme spirituel trouve fondamentalement son meilleur accomplissement et réalise son salut et celui du monde autour de lui. Étant donné que la «spiritualité» est une virtualité essentielle à l’être humain et que l’homme (et la femme) spirituel se trouve partout, autant dans les religions qu’en dehors d’elles, mais qu’il est plus probable de le trouver dans le contexte d’une structure religieuse, on peut dire que chaque religion qui héberge des chercheurs de Dieu, héberge aussi des promesses, des semences et des possibilités de salut. Chaque religion est donc, à sa façon, salvifique et porteuse de salut. Mais il n’y pas de religion qui soit plus salvifique qu’une autre. Chaque religion trace et décrit à sa façon le chemin qui mène à la rencontre avec la Réalité Ultime. Dans chaque religion il y a et il y a toujours eu des êtres humains qui suivant ce chemin réussissent à se centrer en Dieu et à se décentrer d’eux-mêmes, pour devenir des êtres lumineux, éveillés, divinisés, «sanctifié», véritables «fils de Dieu», animés par la présence en eux de l’Esprit de Dieu», personnes de don, de compassion et d’amour pour tous les vivants.

L’acceptation du christianisme comme une réponse humaine valide au Divin parmi tant d’autres réponses humaines valides, constitue, sans doute, la mort d’une forme ancienne et périmée de foi chrétienne; mais ne comporte pas nécessairement la mort du christianisme en tant que tel. Elle marque plutôt la renaissance d’un christianisme qui a atteint une nouvelle étape de la conscience humaine: le stade d’une conscience humaine qui a cessé d’être «provinciale» pour devenir mondiale. Ce phénomène marque un pas évolutif important de la race humaine dans sa marche vers un plus grand perfectionnement.

De tout cela il résulte que les religions en général et la religion chrétienne en particulier, avec leurs respectives théologies, doivent changer de paradigme, c’est-à-dire changer l’ensemble normatif global de leurs croyances, de leurs valeurs et des techniques de salut qu’elles proposent à leurs fidèles. Elles doivent abandonner leurs certitudes déphasées, leurs sécurités dogmatiques, leurs prétentions arrêtées d’être chacune l’unique et l’exclusive porteuse de vérité et de salut. Elles doivent accepter d’entrer dans les terres inexplorées de la complexité et de la perplexité de la Réalité. Elles doivent cesser de s’obstiner à vouloir parcourir les vieux sentiers de la répétition lasse de «vérités révélées» qui n’intéressent plus personne et auxquelles plus personne ne croit. Elles doivent cesser de proposer les réponses du passé aux questions du présent. Afin de survivre dans la postmodernité, il faudra que les religions apprennent à marcher au rythme de l’histoire; à s’adapter aux nouvelles découvertes scientifiques, à la nouvelle vision cosmologique, à la globalisation planétaire, au dialogue interculturel et inter-religieux, au jugement critique, à une éthique décomplexée et libératrice.

Il est difficile de prévoir si elles vont s’adapter aux exigences de la modernité et si elles auront le courage de changer, pour ainsi dire, d’identité. Une chose est certaine: pour que les religions puissent survivre dans le futur, il faudra non seulement qu’elles changent de «visage», mais il faudra surtout qu’elles changent de «personnalité».


MB






Ouvrages de référence sur la même thématique :

-Towards a post-religional paradigm -Theological proposal , ATWOT’s International Theological Commission, dans revue Relat, 425.

Un cristianismo que se ve a sí mismo como una religión verdadera entre otras,  John HICK , dans revue Relat , 427.

GIL, Jesús - OLLETA, Txema, Comunidad de Balsas, Un lenguaje nuevo para una teología nueva. Edición digital, agosto 2013, 97 pp..

La metafora de Dios encarnado – Cristologia para un tiempo pluralista, John Hick, Ediciones Abya-Yala, Quito, Ecuador, 2004, 229 pp..

 

 



mercredi 10 décembre 2014

L’INCARNATION DE DIEU, COMMENT INTÉGRER CE DOGME CATHOLIQUE DANS UNE FOI MODERNE ET ADULTE?



Le christianisme est essentiellement fondé sur la foi au dogme de l’Incarnation historique de Dieu dans la personne de Jésus de Nazareth. Le christianisme ne se tient que par ce dogme. Le sort du christianisme dépend donc du sort réservé à ce dogme. Or, l’homme moderne est trop cultivé et trop marqué par la pensée positiviste, rationaliste, séculière et scientifique pour croire encore à la possibilité d’une intervention réelle (ontologique) de la divinité dans l’histoire concrète de l’humanité. Il a depuis longtemps abandonné l’idée d’une divinité personnelle qui, de sa demeure éternelle là-haut dans les cieux et en dehors de notre monde, interviendrait pour conduire ou régler les affaires des hommes. Il a intégré depuis longtemps à son inconscient la loi de l’analogie. Cette loi énonce que ce qui est rationnellement irrecevable dans le présent, l’a toujours été aussi dans le passé. L’homme moderne ne peut donc accepter une intervention divine dans le concret de l’histoire humaine que comme une fable ou un mythe. Il est absolument incapable de lui accorder la consistance ontologique d’un fait  historique. Si donc l’homme moderne refuse de conjuguer au présent l’idée d’un Dieu qui se ferait homme ou d’un homme qui deviendrait un Dieu, l’Institution religieuse perd son temps à vouloir le convaincre que cela a été pourtant possible dans le passé. Jusqu’à quand la croyance en une Incarnation de Dieu réussira-t-elle à survivre à l’esprit critique d’une société instruite, séculière et  scientifique ? Jusqu’à quand la proclamation d’un Dieu-homme ou d’un homme-Dieu pourra-t-elle continuer à être proposée par nos églises chrétiennes, sans que cela ne déclenche le sourire de leurs destinataires? Jusque quand les églises chrétiennes pensent-elles être prises au sérieux lorsqu’elles affirment que Jésus de Nazareth est l’incarnation de Dieu sur terre? Jusqu’à quand  réussiront-elles à maintenir branché ce poumon artificiel qui les fait vivre?

D’aucuns argueront peut être que, si ce poumon a fonctionné pendant deux mille ans, il n’y a aucune raison pour qu’il s’arrête maintenant. Ceux qui pensent ainsi, oublient que la foi au dogme de la divinité de Jésus a toujours eu dans l’histoire de l’Église des bases extrêmement fragiles; qu’il s’est maintenu jusqu’à nos jours que grâce à la vigilance et à la coercition exercés par les autorités ecclésiastiques, qui n’ont jamais hésité à suffoquer par la force, le feu et le sang, tous les soi disant «hérétiques» qui au cours de l’histoire avaient osé le contester. Cette foi religieuse en l’incarnation de Dieu sur terre est davantage le résultat de la politique et de la violence que d’une véritable conviction. Le dogme fut proclamé en 313 au Concile de Nicée (repris et réélaboré ensuite au Concile de Chalcédoine en 451) par une poignée d’évêques orientaux convoqués par l’empereur Constantin qui craignait pour la paix  de son empire et il fut imposé d’autorité à une chrétienté en mal d’unité et d’homogénéité. Même pour les théologiens du quatrième siècle, la divinité de Jésus de Nazareth n’a jamais été une évidence et elle ne s’est imposée à la croyance des fidèles que lentement, douloureusement et tardivement. Au cours des siècles suivants et jusqu’à nos jours, la préservation et la protection du dogme de la divinité de l’homme de Nazareth a été l’objet d’une vigilance presque paranoïaque de la part des autorités ecclésiastiques. Sur ce point l’Église n’a jamais baissé la garde; car, en protégeant par tous les moyens à sa disposition le contenu de ce dogme, elle avait conscience de défendre son propre pouvoir et sa propre existence. Le combat acharné qu'au long des siècles les autorités religieuses catholiques ont  mené contre les philosophies ou les courants de pensée qui ont voulu critiquer ou mettre en doute le dogme de la divinité du Nazaréen, a été, pour l’Église, une véritable lutte de «légitime défense», où tous les moyens étaient «légitimes», même lorsqu’ils allaient à l’encontre des principes évangéliques les plus évidents. Pour cela il n’a pas hésité à recourir à la force, à la peur, à l’intimidation, à la torture, à la peine de mort, à l’infantilisation et à la tutelle intellectuelle des fidèles, au contrôle des consciences, à la suppression de la liberté de pensée, à la «diabolisation» du doute, à l’exaltation des vertus «chrétiennes» de docilité, de soumission et d’obéissance  «aveugle. C’est ainsi que la foi en la divinité de Jésus de Nazareth a pu se maintenir au travers des siècles et parvenir jusqu’à nous.

On peut donc affirmer que dans l’Église la persistance de la foi en la divinité de Jésus de Nazareth est davantage le résultat de la surveillance et de la peur, que de la conviction des fidèles. En conséquence de cela, le dogme de l’Incarnation qui soutient l’Église est aussi paradoxalement celui qui  la défigure, la  handicape et l’affaiblit.
Ces considérations nous fournissent la clef pour comprendre les raisons de la désaffection et du désintérêt grandissant de la société moderne occidentale envers l’Institution chrétienne en général et l’Institution catholique en particulier. Un mouvement religieux fondé sur des affirmations qui s’avèrent fausses et qui a été  maintenu en vie par la coercition et la peur, porte en lui les fractures qui l’amèneront inévitablement à sa propre disparition. La crise qui affecte l’Église en Occident est surtout et avant tout une crise d’authenticité, de vérité et donc de crédibilité.

Faudra-t-il bannir le Christ de l’horizon chrétien pour ne retenir que l’homme de Nazareth? C’est sans doute la question à laquelle se confronteront les chrétiens des générations futures. Une plus grande scolarisation, une meilleure information, un esprit critique plus averti, une connaissance plus complète de l’histoire des religions et des fondements anthropologiques du phénomène religieux, les conduiront inévitablement à interpréter en clef mythique et symbolique l’affirmation de l’Incarnation de Dieu et donc à voir dans l’Homme-Dieu de la foi chrétienne l’expression méditerranéenne d’un archétype ou d’un mythe assez répandu parmi les religions anciennes. Il est clair que la seule façon de donner aujourd’hui une certaine crédibilité au dogme chrétien de l’Incarnation et donc de le rendre acceptable pour les nouvelles générations de croyants, consiste à renoncer à son prétendu contenu ontologique et à son caractère d’événement historique, pour ne le considérer que comme une métaphore ou une expression symbolique de la présence du divin dans les profondeurs de l’Univers et au «centre» de chaque humain. Seulement une interprétation symbolique de l’incarnation de Dieu au cœur de la réalité existante et surtout  au cœur de l’homme est en mesure de garder du sens et de la crédibilité à cette donnée fondamentale de la foi chrétienne.


MB

mercredi 26 novembre 2014

DANS LE FRÈRE NOUS TROUVONS LA PRÉSENCE DE DIEU



Mt.25,31-46

Dans ce récit de la venue du Seigneur à la fin des temps que l’on trouve au chapitre vingt cinq de l’évangile de Matthieu, il est question d’un tri entre les bons et les moins bons. Cette parabole cherche à nous rendre conscients du fait que l’amour pour Dieu, qui nous est prêché de toutes parts, n’est pas quelque chose d’évident pour l’homme. Cet amour est là où nous ne le cherchons pas ; et il n’est pas là où nous voudrions le trouver. Cet amour pour Dieu peut même être, très souvent, un leurre ou un alibi qui nous dispense d’aimer les seuls êtres que nous soyons vraiment capables d’aimer : nos frères humains. Tout amour envers Dieu qui ne se concrétise pas comme amour humain envers nos frères, est un mythe qui risque de nous égarer sur les chemins de l’utopie et de l’illusion.

Les religions nous disent d’aimer Dieu. Le pouvons-nous vraiment d’une façon humaine? Un sentiment amoureux envers Dieu est-il possible chez des humains dont les mécanismes de l’amour sont déclenchés seulement par l’intermédiaire de leurs sens? Comment aimer Dieu d’un amour humain, car humains nous sommes, si l’objet de cet amour est une Entité ineffable, une Énergie inimaginable, insaisissable, invisible, inconnue, muette, absente, dont l’existence même est discutable?

Jésus de Nazareth nous dit cependant qu’il est possible d’aimer Dieu, mais essentiellement à travers l’amour que nous portons à notre prochain. Il y a des gens qui sont si préoccupés de plaire à Dieu; de savoir si leur vie, leurs comportements sont conformes ou pas à sa volonté et à ses commandements, tellement soucieux de bien faire leurs devoirs et d’être des enfants disciplinés et sages, qu’ils ne voient plus les personnes autour d’eux. L’importance ou la place qu’ils accordent à Dieu et à la religion, les détourne de leurs frères et les rend insensibles et aveugles à leurs besoins.

C’est assez facile d’avoir le désir de plaire à Dieu. Ce qui est difficile c’est d’avoir le désir et la préoccupation de plaire à notre prochain. La chose la plus difficile, en réalité, ce n’est pas d’aimer le bon Dieu du ciel, mais d’aimer l’homme concret, rustre et souvent crapuleux de la terre.

Ce récit évangélique cherche à nous faire comprendre que nous devons aimer les autres non pas pour Dieu, mais pour eux-mêmes. Je dois t’aimer, toi que je rencontre, toi qui es sur mon chemin; parce que ta présence en ce monde est importante; parce que tu as besoin de moi; parce que ton sort m’intéresse; parce que ta souffrance me bouleverse; parce que je veux contribuer à ton bonheur. Jésus nous dit que la seule façon humaine d’aimer Dieu consiste à aimer notre prochain en qui Dieu vit et se manifeste. «Comment peux-tu dire d’aimer Dieu que tu ne vois pas, si tu n’es pas capable d’aimer le frère que tu vois ?».

Dans ce texte du jugement dernier, la différence entre ceux qui sont rangés à droite et ceux qui sont rangés à gauche est constituée par l’empathie que les uns ont eue et que les autres n’ont pas eue. L’empathie est la capacité de sentir avec, de pâtir ensemble, d’avoir de la compassion, d’entrer à l’intérieur de l’autre et de ressentir ce que l’autre vit dans son cœur. La différence entre ces deux groupes de personnes consiste dans le fait que les uns se laissent affecter, interpeller, toucher par ceux qui les entourent, tandis que les autres élèvent des barrières, se protègent, assument une attitude de défense, de méfiance, et donc d’indifférence et de rejet. Ceux de droite entrent dans la vie de l’autre et y participent, ceux de gauches restent à l’extérieur et imperméables à ce que les autres vivent et donc indifférents et insensibles.

Sentir de l’empathie (compassion) est alors se laisser impliquer, se laisser entraîner dans le destin de l’autre et par le destin de l’autre. Et on ne peut pas pénétrer dans la vie de l’autre sans en être affecté, transformé. L’empathie et la compassion nous changent. Car si nous nous faisons toucher par les autres, si les autres pénètrent dans notre cœur, nous devenons forcement des nouvelles personnes, remodelées à l’image des autres, enrichies de toutes les richesses que les autres apportent. Nous acquérons un supplément de cœur, d’âme et d’esprit. Une vie ainsi ouverte aux autres nous met en communion avec le monde entier. Plus rien ne nous est étranger. Nous devenons familiers et amis de tout ce qui existe autour de nous, car notre cœur pulse au rythme du cœur de Dieu. Nous nous «divinisons», car nous avons en nous les mêmes sentiments qui sont en Dieu. En conséquence de cela, nous pouvons nous sentir en communion avec tout ce qui existe dans l’Univers ; unis aux arbres, aux fleurs, aux oiseaux, aux rivières et à la mer, aux enfants et aux personnes âgées, à ceux qui sont dans la douleur et à ceux qui sont dans la joie; à l'arc en ciel et aux galaxies. La vie devient une émotion très intense et d’une merveilleuse richesse intérieure. Nous nous construisons comme personnes qui possèdent une qualité supérieure d’humanité. Dans l’amour nous nous humanisons; sans l’amour nous nous déshumanisons… et nous manquons le but de notre présence en ce monde.

Mère Teresa était un jour en train de soigner un moribond couvert de plaies purulentes sur un trottoir de Calcutta. Un journaliste qui la voyait faire lui demanda: «Pourquoi faites-vous cela ?» Il s'attendait à ce que Mère Teresa lui réponde «Pour Dieu», mais elle lui répondit: «Parce que j’ai de la compassion pour cette personne».  «Par amour pour Dieu?», reprit l’autre. "Non, par amour pour cet homme et parce que sa souffrance touche mon cœur ». Et le journaliste d'ajouter « Moi je ne le ferais même pas si l’on m’offrait un million de dollars» - « Moi non plus» répondit» mère Teresa. «Même si Dieu lui-même me demandait de le faire», reprit le journaliste, «moi non plus» rétorqua Teresa. Et si Dieu n'existait pas?", demanda-t-il une autre fois à Mère Teresa. «Je n'aime pas pour Dieu. J’ai toujours agi par amour pour ceux et celles que j’ai rencontrés dans ma vie"».
Je ne sais pas si celui que dit aimer Dieu l’aime vraiment, mais cet évangile veut certainement nous enseigner que l’amour que nous ressentons pour notre semblable est la seule façon humaine que nous avons, que nous le sachions ou pas, d’aimer Dieu.

MB


mardi 25 novembre 2014

ERREURS SUR LE MONDE, ERREURS SUR DIEU



Les défis posés par la nouvelle cosmologie à la théologie et à la spiritualité


Au cours de son œuvre Saint Thomas d’Aquin affirme à plusieurs reprises qu’une fausse idée sur le monde entraîne toujours une fausse idée sur Dieu… Cela signifie que si je pense que le monde est éternel, non-créé, divin, profane … chacune de ces affirmations affecte l’idée que je me fais de Dieu. Cela n’est pas étonnant, car dans l’Univers, c'est-à-dire dans la réalité de ce qui existe, tout est en relation avec tout; tout est interconnecté, tout est dépendant de tout, de sorte que l’on ne peut pas « toucher» à quelque chose sans influencer tout le reste et sans impliquer l’ensemble de la réalité. Toutes les pièces de la mosaïque de la réalité font partie d’un tout et l’affectent et donc affectent aussi la façon de concevoir Dieu, qui est la dimension la plus profonde de la réalité. L’histoire des religions abonde d’exemples de l’implication de ces deux dimensions: Dieu et le monde. On pourrait affirmer que l’histoire de l’humanité est l’histoire d’une connaissance en continuel développement et l’histoire d’une religion dont les affirmations et les certitudes sur Dieu diminuent et régressent en fonction du progrès des connaissances humaines sur la nature du monde. Dans les temps anciens, Dieu était l’«expédient» ou la «combine» auxquels l’ignorance humaine faisait recours pour avoir une explication plausible et satisfaisante de la réalité («Deus ex machina»).

Le progrès scientifique de ces trois derniers siècles a été tellement fulgurant et extraordinaire que l’ancienne perception du monde, à force de reculer, a fini par se désintégrer complètement. Un grand nombre de fidèles des églises traditionnelles ont cherché à faire face à ce problème par une attitude aux caractéristiques «schizophrènes». La schizophrénie est caractérisée par la difficulté à partager une interprétation du réel avec d’autres individus, ce qui entraîne des comportements et des discours bizarres, parfois délirants. Ces fidèles ont divisé leur esprit en deux secteurs bien distincts: d’un côté leur vie et leurs croyances religieuses et de l’autre leurs connaissances scientifiques qui sont continuellement révisées et mises à jour. Dans leur vie ordinaire et à l’Université ils communient sans aucune hésitation avec le progrès scientifique, mais dans leur vie religieuse et spirituelle ils préfèrent continuer à adhérer à la vision mythique de la réalité reçue du passé et qui s’exprime dans les croyances, les rites et les sacrements de leurs églises. Les continuelles découvertes d’«erreurs sur le monde» de la part des sciences modernes (surtout physique quantique et astrophysique), ont donc entraîné avec elles de nombreuses découvertes d’«erreurs sur Dieu» dans presque toute les expressions de la religion: la théologie, la spiritualité, le dogme, la morale, les traditions et les croyances…

Dans cette étude nous aborderons les «erreurs sur Dieu» (compris dans le sens plus large d’erreurs religieuses, théologiques, spirituelles, morales…) venues à la lumière en vertu du progrès et des découvertes de ce qui nous appellerons la «nouvelle cosmologie» ou le «nouveau paradigme écologique».


Première erreur sur le monde: le géocentrisme

Le conflit entre Galilée et l’Église catholique du XVIe siècle est emblématique du conflit entre la science et la foi. Galilée, avec le télescope qu’il avait perfectionné, a pu constater une erreur sur le monde dans les convictions religieuses de son époque: notre terre n’était pas au centre de la réalité connue, mais l‘axe était constitué par le soleil autour duquel la terre évoluait. La terre cessait d’être le centre de l’Univers. L’être humain, l’enfant chéri de Dieu, la pupille des ses yeux, la raison et le but de la création et de l’histoire, n’était pas situé au centre du monde, mais il habitait une insignifiante planète rocheuse qui vaguait dans l’espace. Aujourd’hui cela nous paraît évident, mais au temps de Galilée cette évidence était difficile à accepter autant de la part de ses collègues que de la part des représentants des Églises. Ces derniers ne s’opposaient pas tellement à une vérité proprement scientifique, mais au changement de perspective que cela impliquait et qui remettait en question tout ce qu'on avait pensé et cru à propos de Dieu et du monde jusque là. De leur point de vue, les églises se révoltaient aussi contre «une erreur au sujet du monde qui impliquait une erreur au sujet de Dieu».

Jusqu’alors la croyance commune considérait comme une évidence que l’être humain était la raison pour laquelle Dieu avait créé le monde et que tout le cosmos tournait autour de cet être humain et donc autour de la Terre, la maison qu’il habitait. Affirmer que la Terre n’était pas le centre du cosmos, mais seulement une planète errante autour d’un autre centre, comportait de graves conséquences. En voilà quelques unes: les plans de Dieu n’étaient pas comme on les croyait. L’homme n’était pas la raison principale de la création. La Parole de Dieu (la Bible) qui depuis toujours semblait avoir clairement proclamé ces «vérités» (dans la Genèse, les Psaumes, et même par la bouche de Jésus) s’était trompée. Dieu s’était trompé. Dans la pensé de l’Église, il ne s’agissait pas seulement d’«une erreur sur Dieu », mais d’«une erreur de Dieu». Le géocentrisme, que les sciences astronomiques avaient démontré comme étant une erreur sur la façon de comprendre le monde mettait à découvert une erreur à propos de Dieu dans laquelle les Églises n’avaient aucune intention d’embarquer. L’Église catholique a pris trois siècles pour admettre cette erreur. Les chrétiens finirent par se convaincre que, effectivement, la Terre tourne autour du Soleil et qu’elle n’est pas le centre géométrique du système solaire… Cependant, dans l'esprit des croyants, elle continuait à être «le centre» dans un autre sens: elle est le centre salvifique de la réalité cosmique, parce qu’ici, sur cette planète minuscule et marginale tant que vous voulez, s’est accompli le mystère central de tous les temps: l’incarnation du Fils de Dieu et sa mort sacrificielle qui a sauvé l’humanité, avec le cosmos et ses créatures qui gémissaient dans les douleurs d’un enfantement. D’après ces chrétiens et cette théologie; il s’agit là d’une centralité réelle et plus profonde.

Avec le temps, la théologie a fini par abandonner les affirmations théoriques et les représentations d’un Dieu créateur d’homme au centre de l’Univers.
Tout compte fait, l’ingestion de l’erreur du géocentrisme à pu se faire sans trop de vomissements et de maux de ventre de la part des théologiens et des Églises. Il est certain que l’intégration, de la part des Églises, d’un grand nombre d’autres «erreurs» sur le monde que les sciences modernes ont dénoncé au cours de ce dernier siècle, va être plus douloureuse et plus compliquée. Cette intégration va exiger une conversion radicale de la pensée religieuse et des «changements de paradigme» dans le sens le plus fort de cette expression.


Deuxième erreur sur le monde: l’anthropocentrisme  

Beaucoup plus difficile que l’abandon du géocentrisme va être le dépassement de l’anthropocentrisme, profondément enraciné dans les mentalités et la culture chrétienne de l’Occident. La nouvelle cosmologie a découvert depuis longtemps que l’être humain n’est pas le centre du cosmos, comme l’ont proclamé presque toutes les religions et leurs divines «révélations». Le monde n’est pas anthropocentrique. Nous ne sommes pas le centre de la réalité. L’univers n’a pas été «créé pour nous». La cosmologie moderne nous dit qu’à cause de la nature de nos origines, nous sommes une réalité ni supérieure ni totalement différente des autres espèces vivantes qui nous entourent. Nous n’avons pas une autre origine et nous ne venons pas d’un monde supérieur. Nous ne sommes qu’une branche supplémentaire de l’époustouflante diversité de l’arbre de la vie. Nous sommes une branche de primates à l’intérieur de laquelle, grâce à un saut qualitatif de la vie, il y a eu une mutation de l’axe évolutif qui, de génétique et physique qu’il était, est devenu culturel et spirituel.

Il est donc faux d’affirmer que nous avons été créés à part et «à l’image et à la ressemblance de Dieu », alors que les autres créatures vivantes ne peuvent pas aspirer à la dignité d’être des «enfants de Dieu». Nous n’avons même pas été créés. Nous sommes une espèce qui vient d’autres espèces qui, à leur tour, dérivent d’autres espèces plus anciennes reliées aux premiers organismes vivants (les bactéries) apparus sur terre il y trois milliards d’années. La nouvelle cosmologie pense que l’ensemble des êtres vivants de la planète participe de la même Vie, forme une unité de Vie et une seule réalité biotique énormément diversifiée et complexifiée. L’espèce humaine est la forme de vie la plus récente et la plus évoluée; mais nous ne sommes qu’une forme de vie parmi tant d’autres.

Le fait d’avoir cru et affirmé le contraire pendant des millénaires, a constitué une erreur à propos de notre monde qui a occasionné une erreur à propos de Dieu. La théologie chrétienne traditionnelle à été bâtie sur ces erreurs. L’Église a toujours considéré ces erreurs comme des vérités révélées et donc absolument certaines et elle les a imposées avec la force et la contrainte à l’assentiment de ses fidèles. Aujourd’hui, si l’Église veut survivre dans la société moderne et parler un langage qui fasse du sens, elle doit bâtir sur d’autres assises sa doctrines et ses croyances.

La cosmologie moderne sait, en dehors de tout doute, que l’humanité ne descend pas d’un couple primitif (Adam et Ève). L’idée d’un couple «source» primordial et originel est une image mythique qui est suggestive pour véhiculer la notion de création divine de l’être humaine, mais qui ne concorde absolument pas avec les évidences des sciences anthropologiques.
La croyance en un couple originel primitif a été une erreur sur le monde et par conséquent aussi une erreur sur Dieu. Cette erreur rend totalement farfelues et ridicules les affirmations théologiques sur l’état de bonté et de perfection originelles du couple primitif doué de «dons naturels» et « préternaturels» et d’une conversation directe avec le Dieu.

Ceci mérite une mention particulière sur ce que l’on a appelé le «péché originel», commis par ce couple originel qui n’a jamais existé et qui aurait eu comme conséquence de contaminer tous leurs descendants, de les expulser du Paradis, de les condamner pour toujours aux fatigues du travail et aux affres de la mort.

Il s’agit ici d’une erreur sur le monde qui se révèle, une fois de plus, comme une erreur sur Dieu. Une théologie responsable ne devrait plus s’appuyer sur le mythe du «péché originel», considéré pendant des millénaires comme un événement réel et historique, pour continuer à justifier la doctrine perverse de la rédemption qui a causé tant de souffrances et qui a opprimé les croyants en les écrasant sous le poids de fautes et de la culpabilité.

Ce point est l’un des défis les plus importants que la théologie moderne doit aborder. Car, s’il n’y a pas eu de couple originel, il n’y a jamais eu de «péché originel» qui a contaminé l’humanité. Si nous ne sommes pas cette «massa damnata», cette humanité déchue proclamée par saint Augustin, il n‘y a pas besoin d’expiation pour une faute originelle qui n’a jamais existée. Il n’y a donc aucune raison d’affirmer la nécessité d’une rédemption divine qui n’a eu lieu que dans l’imagination des théologiens. Si l’on n’a plus besoin d’un Dieu-Fils qui prend chair dans un corps humain pour venir réparer, à travers une mort sacrificielle, les dégâts causés par la contamination du péché des origines …  alors, une théologie responsable, qui ne choisit pas de fermer les yeux, doit obligatoirement se réinventer et reformuler de fond en comble les contenus des dogmes et des doctrines proposés par les Églises à la foi des croyants.

La nouvelle cosmologie et les sciences de la vie en général, avec les mouvements écologiques modernes, dénoncent ce que l’on appelle, avec un néologisme, l’«espécisme» c’est à-dire l’abus de pouvoir de la part de l’espèce homo sapiens. Sur la base d’une idéologie construite par le même homo sapiens, celui-ci s’autoproclame maître, patron, seigneur, dominateur incontesté et absolu du monde, « la raison finale» de l’existence de l’univers, avec le droit d’utiliser et d’exploiter la création, comme si elle n’était qu’un objet et un bien de consommation à sa disposition. Les mouvements écologiques, depuis plusieurs décennies désormais, cherchent à répandre une intuition qui est, au moins en théorie, presque universellement acceptée comme une évidence qui devrait se changer en principe juridique et en loi. Cette intuition consiste à dire que tous les êtres vivants ont des droits: le droit de vivre, le droit au respect; le droit aux soins et à la sauvegarde des milieux et des systèmes naturels qui assurent leur existence et qui permettent la conservation durable de leur espèce. Il en suit que l’homo sapiens n’a pas le droit de soumettre cruellement les autres espèces à sa volonté et à ses caprices ; qu’il n’as pas le droit d’intervenir, comme bon lui semble, sur la nature pour satisfaire ses intérêts et son avidité; qu’il n’a pas le droit de dégrader et de détruire les milieux naturels de vie qui sont comme les niches écologiques d’une multitude d’autres espèces vivantes. Lynn White dans un article resté célèbre publié dans la revue «Science» 155 (1967) a dénoncé «le judéo-christianisme comme la religion la plus anthropocentrique». À son tour, la doctrine chrétienne a presque transformé en article de foi l’affirmation que l’homme est roi et maître de la création et qu’il a reçu de Dieu lui-même la consigne de s’élever au-dessus de toutes les autres créatures pour les soumettre et les dominer. La théologie traditionnelle des Églises a toujours été de mèche avec cet anthropocentrisme hystérique et cet espécisme aveugle et déréglé. Elles n’ont eu d'yeux que pour regarder la réalité du point de vue des intérêts de l’espèce humaine, comme s’ils étaient les intérêts de Dieu lui-même.

Une théologie responsable qui cherche a être à la hauteur des acquis des sciences modernes doit abandonner une fois pour toutes cet anthropocentrisme et emprunter le chemin du biocentrisme (tout centrer sur la vie) et chercher à réaliser une démocratie vraiment universelle, c’est-à-dire une biocratie planétaire, comme le souhaiterait le Dieu de la Vie, le Dieu de toute forme de vie.

La nouvelle cosmologie met en évidence notre caractère fondamentalement  tellurique: nous ne sommes pas des esprits, ni des dieux ou des êtres venus d’ailleurs. Nous sommes venus de la Terre. Nous sommes la fleur du processus évolutif de la vie qui a eu lieu sur cette planète. Nous sommes Terre, mais une Terre qui est arrivée à la conscience, à la réflexion, à l’amour, à la contemplation, à l’émerveillement… A partir de cette nouvelle vision de la réalité, les religions et les spiritualités modernes peuvent découvrir «une erreur à propos du monde» partagée dans le passé par beaucoup d’autres cultures, philosophies et religions. Celles-ci ont interprété la «supériorité» de notre race, tout récemment surgie du processus évolutif, comme si elle découlait d’une supériorité de nos origines; comme si les êtres humains ne venaient pas de ce monde, mais d’un monde supérieur, du monde de la divinité. Nous serions les «fils du Ciel» et non pas les fils de la Terre, tombés accidentellement sur une planète qui n’est pas vraiment notre demeure et sur laquelle nous vivons en pèlerins et en étrangers, dans l’attente anxieuse de nous libérer des chaînes qui nous attachent à cette «vallée de larmes» pour pouvoir enfin rejoindre notre vraie patrie dans les cieux. Cette erreur sur le monde a produit une erreur sur Dieu, perçu comme une divinité austère qui nous demande de nous détacher des choses de ce monde (fuga mundi, contemptus mundi) et de renoncer aux bonheurs et aux plaisirs éphémères qui nous viennent de notre condition matérielle, charnelle et terrestre.


Troisième erreur sur le monde : l’unicité de l’espèce humaine

Pendant des millénaires les humains non seulement ont cru être le centre et au centre de l’Univers, mais aussi d’y être uniques. Ce monde, notre monde, était «LA» création de Dieu, la pupille de ses yeux, l’œuvre de ses mains, et en dehors de lui il n’y avait rien. Giordano Bruno, pour avoir affirmé qu’il y avait d’autres mondes et probablement aussi d’autres Univers, a été brûlé vivant à Rome par l’Inquisition papale et ses cendres jetées dans le Tibre. L’unicité du monde, de l’être humain, du plan de Dieu qui nous a créés et rachetés, ont toujours été, dans la doctrine catholique, un postulat fondamental et un axiome de base jamais contestés et imposés à feu et à sang.

La nouvelle cosmologie a définitivement mis fin à la croyance en l’unicité de notre monde humain. Elle a mis au clair que cette croyance a constitué une erreur sur le monde. La Terre n’est qu’une planète parmi tant d’autres du système solaire et notre soleil n’est qu’une minuscule étoile parmi les cent milliards d’autres étoiles de notre galaxie. Les astronomes ont calculé que dans la Voie Lactée 22% des étoiles semblables au soleil gardent en orbite autour d’elles des planètes qui pourraient posséder les conditions favorables à l’éclosion de la vie. Selon le calcul des astrophysiciens, seulement dans notre galaxie, le nombre approximatif total des planètes «habitables» serait de 8,8 milliards. Selon les dernières estimations de la NASA, les astronomes ont découvert et observé à ce jour 1792 exoplanètes (planètes hors du système solaire). Cela signifie que notre planète n’est pas la concrétisation d’un « plan de Dieu», comme nous l’avons cru pendant longtemps. Croire cela, a été une «erreur sur Dieu» basée sur une «erreur sur le monde» dont nous avons été victimes à cause de la déficience de nos moyens d’observation. Aujourd’hui nous avons pris conscience de ces deux erreurs. La réluctance de la religion à vouloir les reconnaître ne peut pas nous enlever le droit d’accepter la vérité et de mettre entre parenthèse les affirmations de la religion et de la théologie fondées sur ces erreurs et proposées pendant des siècles comme des «vérités» à croire. Une théologie responsable doit aujourd’hui se reconstruire à partir de ces nouvelles données et de cette vision beaucoup plus ample de la réalité.


Le dualisme des deux étages

La nouvelle cosmologie dénonce l’«erreur à propos du monde» commune à beaucoup de religions et cultures et qui a consisté à penser que toute la réalité était fondamentalement divisée en deux parties, jusque dans son essence la plus profonde. Ce dualisme se manifestait à tous les nivaux: cosmique (terre/ciel), physique (matière/ esprit), humain (corps/âme), hylémorphique (matière/forme), religieux (naturel/surnaturel)…. Deux mondes radicalement différents et opposés. Un monde à deux étages, divisé, schizo-phrène .

La nouvelle cosmologie, avec les nouvelles sciences physiques, nous a appris que nous nous étions totalement mépris sur la constitution matérielle de ce monde. La matière n’est pas cette entité sans valeur, simple potentialité, informe, stérile, inerte, passive que dans le passé nous avions cru qu’elle était. De fait, la matière n’existe pas. Einstein nous a appris que la matière n’est qu’un des états de l’énergie; et l‘énergie est la force qui structure l’Univers entier. La matière est donc une des manifestations de cette énergie qui a seulement besoin de conditions adéquates pour s’auto-organiser (autopoiesis). Tout est relié à tout, dans un jeu extraordinaire de synergies et d‘influences réciproques. Et tout n’est qu’une même réalité qui bouillonne dans une effervescence de variations et changements de formes. Au niveau subatomique, tout se réduit à une «soupe quantique» qui revêt des formes continuellement changeantes aux stades supérieurs et pluridimensionnels du monde matériel sensible.
C’est grâce à la nouvelle cosmologie, à la biologie et à la physique quantique que nos avons pu récupérer une vision intégrée, unitaire, unifiée, «holistique», non-dualiste de la réalité. Et maintenant la religion, la théologie, la spiritualité doivent intégrer à leurs doctrines cette vision holistique si elles veulent avoir du sens pour les gens de la modernité. Les concepts et la terminologie traditionnelle de corps/âme, naturel/ surnaturel, nature/grâce, terre/ciel, paradis/enfer…, qui sont l’unique alphabet que la théologie classique a utilisé, devront être carrément abandonnés et remplacés par une terminologie et une vision qui tiennent compte de cette nouvelle compréhension de l’Univers. La réélaboration théologique doit être drastique et aller en profondeur Il ne s’agit pas de faire des retouches, des corrections superficielles ou sommaires. Il ne faut pas oublier, en effet, que ce qui doit être rectifié et dépassé ce sont de graves erreurs à propos du monde et à propos de Dieu.


Conclusion

Dans cette étude nous avons énuméré quelques unes des erreurs principales sur le monde détectées par la nouvelle cosmologie et qui historiquement ont impliqué autant d’erreurs sur Dieu. Aujourd’hui, dans un monde profondément marqué par les connaissances scientifiques, ces erreurs sur Dieu ne font qu’alourdir et embarrasser la religion et la spiritualité, si ces dernières ne sont pas guidées et soutenues par la réflexion critique d’une nouvelle théologie qui les pousse à tout reconsidérer et à tout rebâtir. Cette étude a justement comme objectif de montrer la nécessité de cette tâche.

Pour conclure, voici quelques dernières considérations.

Une première observation voudrait pointer aux dommages causés à la religion par une façon de comprendre (épistémologie) rigide et fixiste. Très souvent les Institutions religieuses donnent l’impression d’être incapables de modifier leurs croyances, même lorsqu’il est évident que cette fixité n’existe que dans l’imagination de leurs adeptes. En effet, l’histoire des cultures montre qu’il existe une continuelle évolution des religions, un syncrétisme, une transformation, une adaptation des religions aux changements philosophiques et historiques. À courte échéance, cependant, les religions résistent et paniquent toujours devant les changements. Elles sont extrêmement récalcitrante à réélaborer et à réinterpréter le patrimoine symbolique qu’elles ont reçu du passé. Elles sont prisonnières d’une épistémologie aggravée par la conviction d’être les dépositaires et les gardiennes attitrées d’une révélation divine. Le nouveau paradigme écologique les met aujourd’hui au défi. C’est aux religions de relever ce défi si elles veulent survivre.

Une deuxième observation voudrait souligner la valeur «révélatrice» de la réalité matérielle qui découle des découvertes scientifiques et en particulier des conclusions et des intuitions de la nouvelle cosmologie. Cette valeur révélatrice du cosmos, comme lieu de la présence et de la manifestation de Dieu, a été admirablement développée par Thomas Berry. Cet auteur affirme que la nouvelle cosmologie nous rend plus sensibles à Dieu et plus aptes à percevoir la manifestation du Mystère Sacré qui pulse dans les profondeurs de la Réalité cosmique, qui devient, pour ainsi dire, l’autre Bible à travers laquelle Dieu parle aux hommes.
La nouvelle vision et la nouvelle intelligence de l’Univers transmises par les sciences et la cosmologie modernes, font désormais partie de la culture et du bagage intellectuel des gens de la modernité. Il s'en suit que l’ancienne façon de comprendre la réalité, propre aux religions en général et au judéo-christianisme en particulier, est devenue aujourd’hui périmée et inacceptable. Certes, l’ancienne façon de comprendre le monde trouve encore des adeptes sporadiques en des chrétiens incultes ou en des croyants cultivés qui acceptent de vivre leur religiosité dans une posture intérieure tiraillée et schizophrène. Il reste cependant vrai que la nouvelle cosmologie, avec la nouvelle compréhension de la réalité qu’elle comporte, est aujourd’hui en train de changer de fond en comble la conscience de l’humanité. Malheureusement, les milieux religieux, théologiques et ecclésiastiques ont de la difficulté à se rendre compte du potentiel révolutionnaire de ce nouveau paradigme. Poussés par un reflexe d’auto-défense et d’autoconservation actionné par leur vieille mentalité, ils pensent qu’il ne s’agit pas là d’une question religieuse et spirituelle, mais uniquement d’une question scientifique.

Une des questions les plus difficile à résoudre et qui suscite beaucoup d’anxiétés et de palpitations dans les milieux religieux traditionnels est celle de savoir comment situer et comprendre maintenant la personne et la fonction de Jésus de Nazareth dans le contexte de la nouvelle vision de la réalité. Il est certain que les affirmations de la christologie classique n’ont plus grand sens ni avenir dans la culture contemporaine, marquée par la nouvelle cosmologie. En son temps, Teilhard de Chardin a essayé d’éclairer d’une nouvelle lumière la place du «Christ» dans l’ensemble de l’économie cosmique et de réaliser une synthèse théologique des deux cosmologies qui s’affrontaient. Toutefois sa synthèse n’a été ni assez convaincante ni assez radicale. Teilhard n’a pas eu le courage (par esprit d’obéissance au pape en tant que Jésuite et par peur des représailles du Saint Office) d’aller jusqu’au bout de ses intuitions et de ses conclusions. Sur beaucoup de questions il n’a pas osé s’éloigner de la compréhension mythique de la Bible et des affirmations de la théologie classique.

Si on ne peut pas négliger la contribution de Teilhard afin de relever les défis posés à la religion par la nouvelle cosmologie, il faut cependant reconnaître que le gros du travail de relecture et de réinterprétation du rôle et de la place de Jésus dans la nouvelle vision cosmologique reste à faire. Cela va être une des plus importantes reconstructions et restructurations critiques que la théologie de notre temps va devoir accomplir.


Étude de José Maria VIGIL, paru dans la Revue «Voices», 2011, 1 – Ecologia y religion, traduit de l’espagnol et adapté pour le lecteur français par Bruno Mori


N.B.: si le lecteur souhaite approfondir sa réflexion sur la question abordée à la fin de cet article, à savoir comment situer et comprendre la personne de Jésus dans le cadre de cette nouvelle vision de la réalité, je peux lui suggérer la lecture de l'article intitulé ''Une nouvelle façon de comprendre l'incarnation de Dieu'' que vous trouverez dans l'onglet ''L'incarnation de Dieu'' sur ce même blog.