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samedi 14 mai 2022


RÊVONS D’AMOUR, LES AMIS !!! 

(5 dim. paques, C -. Jn 13, 31-35 ) 

Nous, les humains, nous sommes des drôles de créatures ! Nous avons été conçus dans une étreinte d’amour, nous sommes entrés dans ce monde grâce à un geste  viscérale d’accueil total, nous sommes faits  pour aimer, nous pouvons aimer  d’une  façon « divine »  … et pourtant nous sommes  très mal à l’aise  dans  l’amour ;  nous parlons rarement et difficilement  le langage de  l’amour ; nous ne donnons pas une  grande valeur à l’amour et, dans notre vie, nous agissons en donnant habituellement beaucoup plus d’importance  à l’argent  et au pouvoir qu’à l’amour.

On peut même dire que la grande majorité des personnes n’ont aucune idée de la véritable nature de l’amour. Ils en ont habituellement une conception sentimentale ou érotique. Ils considérèrent l’amour comme un simple sentiment ou un attrait qui est, sans doute, plaisant et gratifiant, mais qui ne peut pas être assumé dans la vie comme une valeur principale et comme une attitude apte à soutenir la confrontation avec les défauts des personnes et avec les contraintes, les exigences, les luttes de la vie quotidienne, de la vie sociale, politique, économique dans le monde que nous habitons.

Ainsi, pour faire un exemple, dans le mariage, la rencontre de deux amours qui surgissent dans le cœur des amants a habituellement une saveur d’éternité, un désir de don complet de soi à l’autre et une volonté d’accueil total de l’autre dans sa propre vie.  Cependant, dans la société civile et dans l’institution religieuse, cette rencontre amoureuse, faute de pouvoir assimiler l’idée évangélique d’un amour à fond perdu et inconditionnel, est immédiatement contaminée par le virus de l’égoïsme et de l’individualisme et transformée ou plutôt pervertit en une banale transaction commerciale,  en un «contrat» ( le «contrat de mariage) et en une « entente » qui durent le temps que cela « convient » aux  deux partenaires , mais qui cessera aussitôt que l’entente n’existera plus.    

Il s'en suit que dans une la culture rationnelle, technique, pragmatique d’une société capitaliste, individualiste, forcément égoïste et donc souvent cynique, le discours de Jésus de Nazareth sur l’amour fraternel, gratuit et désintéressé n’est ordinairement pas pris au sérieux. Il est considéré comme une charmante divagation lyrique d’un idéaliste et d’un rêveur qui n’a pas les pieds sur terre et qui propose des utopies irréalisables, compte tenu de la dure réalité de notre monde.  

Avec cette attitude et cette conviction, nous avons alors construit un monde où, je ne vis pas pour vivre, mais simplement pour survivre, il faut se battre, être agressifs, compétitifs et souvent impitoyables. Nous avons ainsi mis au point une société qui semble exiger non pas le juste partage des biens dans la fraternité et l’égalité, mais l’agressivité de la détermination à obtenir ce que l’on veut par tous les moyens à notre disposition, même par le recours à la violence, à l’exploitation, au pillage et à la dévastation insensée et stupide de la Planète. Et nous appelons cela civilisation, bien-être et progrès.

Et pourtant dans l’histoire de l’humanité, les rêves, les utopies, les projets retenus irréalisables, l’imagination ont toujours été les grands moteurs qui ont accélérés la marche évolutive de notre espèce, ainsi que de notre humanisation.

 Il n’est pas nécessaire d’être des psychanalystes ou des disciples de Freud, de Wilfred Bion, de Carl Yung ou de Eugen Drewermann pour croire à la valeur des rêves à  ouvrir notre pensée à l’idée et à la possibilité de nouveaux commencements. Regardez les jeunes à l’adolescence de leur vie ! Ils passent leur temps à rêver, à fantasmer ! Et c’est ainsi que surgissent les génies ! C’est ainsi que le futur se profile ! C’est ainsi que le nouveau se dessine et que sont jeté les fondations pour de nouvelles formes d’existence qui font avancer notre humanité. Car, finalement, c’est de la qualité de nos rêves que dépend la qualité de notre vie et de notre avenir. 

C’est pour cela que rêver d’amour ne peut jamais faire du mal à notre monde. Et c’est ce que Jésus de Nazareth a fait ! Il a incarné et vécu un extraordinaire rêve d’amour : gratuit, désintéressé et inconditionnel. En même temps, il nous a prouvé, par toute sa vie, que son rêve pouvait devenir réalité, si seulement nous étions intérieurement assez pauvres, assez libres, assez motivés, assez ouverts, assez courageux et assez confiants pour l’adopter comme mode et style de relation humaine et comme l’orientation de base de notre existence.

Alors, grâce à lui et à sa suite, cela pourrait vraiment faire de nous, ses disciples, des promoteurs d’une nouvelle façon d’être humain, des pionniers d’un nouveau monde et les premiers spécimens d’une humanité recréé et renouvelée, car établie dans la communion et la fraternité de l’amour.

Il s’agit cependant d’un rêve auquel il est difficile de croire et qui est surtout difficile à accepter, tellement il est subversif, révolutionnaire et contestataire. En effet il annule et il condamne par principe le système de pouvoir, d’oppression et d’exploitations sur lequel ont été et sont construites les sociétés, les politiques, les économies et les relations humaines.

Déjà en son temps, Jésus été éliminé à cause de son rêve. Aujourd’hui encore son message d’amour est bien difficile à être accepté et bien loin d’être pris au sérieux, même si l’on commence à se rendre compte qu’il constitue la seule Voie de salut pour notre monde.

En effet, c’est seulement lorsqu’un grand rêve devient réalité, qu’un bond en avant est réalisé dans la marche évolutive de notre humanité. Avec Jésus de Nazareth, continuons à rêver d’un amour fraternel, gratuit, généreux offert à tous sans distinction, car tous fils et filles d’une même famille humaine, d’une même Terre-Mère, d’un même Univers, d’un même Mystère Ultime qui est source de tout être, de toute vie et de toute amour.

C’est la nouveauté de cet amour inconnu auparavant, le grand héritage que Jésus du Nazareth a laissé à l’humanité et particulièrement à nous, qui l’avons rencontré : « Je vous laisse un commandement nouveau : comme je vous ai aimé, aimez-vous aussi les uns les autres ! C’est à cette qualité d’amour que les gens sauront que vous êtes mes disciples » (Jn 13,34-35). Ce sera donc dans la mesure où nous serons capables d’incarner cet amour dans notre vie et de le diffuser autour de nous, que nous pourrions vérifier l’authenticité de notre vie et de notre cohérence chrétienne.

C’est tout un défi et tout un programme de vie que Jésus nous a placé entre nos mains ! Hélas, dans le passé, nous n'en avons pas fait grand-chose. Serons-nous capables d’en faire quelque chose de plus dans le présent ? 


 

Bruno Mori -  mai 2022