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lundi 30 décembre 2019

La famille de Nazareth

Quelques réflexions d’actualité

Chaque année, cette fête me laisse quelque peu perplexe. Pourquoi ? Parce que proposer la famille de Nazareth comme un modèle pour nos familles modernes, en ces temps de fragmentation des anciennes habitudes, de perte de repères traditionnels et de chaos social, me semble quelque chose de vraiment utopique ! Comme me disait un jour cette maman : "Vous avez beau nous proposer l’exemple de la sainte famille, mais Marie avait comme enfant le Fils de Dieu !"

Une fois cette première difficulté acceptée, rien n’empêche que l’on puisse puiser dans cette fête chrétienne de la « Sainte Famille de Nazareth » quelques orientations utiles pour nos foyers d’aujourd’hui, même si nous vivons dans un contexte social et culturel totalement diffèrent et beaucoup plus difficile et compliqué que celui de cette famille qui a vécu il y deux mille ans de nous.

Une première caractéristique de la famille de Nazareth qui pourrait inspirer nos familles, me semble être celle-ci : c'est une famille qui a eu le courage de mettre Dieu au milieu d'elle. Il devrait en être de même dans nos familles de personnes croyantes. Même si nous ne pouvons pas avoir un Dieu qui gambade dans la maison, nous pouvons l'avoir plus présent dans nos décisions, dans notre travail, dans nos choix, dans nos pensées, dans les élans de notre cœur, dans nos conversations, dans nos prières, dans nos préoccupations… Nous, qui vivons aujourd’hui dans une société qui semble l’avoir désormais exclu et banni de ses intérêts et de ses préoccupations.

 Soyons honnêtes, même nous les chrétiens gardons généralement Dieu en dehors de notre famille ; nous ne sommes pas très portés à le mêler à nos affaires… et ça se voit! Alors, pourquoi ne pas jeter un coup d’œil du côté de la famille de Nazareth! Pourquoi ne pas penser que Dieu a peut-être du plaisir à vivre chez nous et avec nous... et que peut-être il souhaite avoir, lui aussi, une petite place à notre table, dans notre salon et dans notre cœur! Alors pourquoi ne pas l’inviter plus souvent ? Pourquoi, tout simplement, ne pas essayer de l'insérer davantage dans nos choix, dans notre rôle éducatif, dans nos relations, dans notre travail ?

Deuxièmement, en regardant cette famille et en lisant les minces informations sur elle fournies par les Évangiles, nous sommes frappés par le climat de Mystère qui enveloppe ses membres. Il est dit que Marie et Joseph gardaient les événements qui leur arrivaient dans leur cœur et qu’ils réfléchissaient sur le sens qu’ils pouvaient avoir dans leur vie; et que le jeune Jésus, grâce à ces parents, « grandissait en taille, en sagesse et en faveur auprès de Dieu et auprès des hommes » ( Lc 2,52).
Je les imagine échanger de longs regards interrogateurs vers cet enfant si égal aux autres et pourtant, si différent et cherchant à saisir quelque chose de son insondable mystère. Cependant, ce mystère qui était propre à Jésus, est finalement aussi celui qui accompagne et enveloppe chacun de nous et qui devrait se transformer en respect et admiration pour la singularité et la profondeur de chaque individu que nous approchons.

Malheureusement, dans nos familles, il y a souvent si peu de respect et d’attention pour ce mystère que chacun porte en lui et qui fait tout son charme et son intérêt ! Il y a souvent si peu de sensibilité et d’attention aux richesses que chacun possède et qui, bien souvent, passent inaperçues et ne sont donc jamais reconnues et appréciées.

Dans nos familles, souvent font défaut la gentillesse et la tendresse qui devraient toujours accompagner nos actions. Nos relations et nos gestes prennent souvent la coloration de la nonchalance et de la rudesse que nous réservons à un bien acquis et assuré qui ne nécessite plus aucun soin ni aucun égard.

Dans nos familles, manque presque toujours la stupeur et la fascination avec lesquelles nous devrions nous regarder les uns les autres. Et cela parce que, malgré les chromosomes et les liens du sang qui nous unissent, chacun est un individu unique, à nul autre pareil, étonnamment différent et donc pas nécessairement destiné à marcher sur la même route des autres. Il faut donc être capables de récupérer le sens du Mystère que chacun porte en soi.

Dans non familles, il faudrait aussi trouver le courage et l’envie de se parler  d’avantage. Mais non pas pour émettre des sons ou pour rompre le silence, mais pour communiquer, pour transmettre nos sentiments, pour partager nos pensées, nos convictions profondes, nos états d’âme. Dans nos familles, nous ne réussissons que rarement à communiquer vraiment en profondeurs les uns avec les autres.

On dirait que plus on est biologiquement proche, plus on ressent de la réticence ou de la pudeur à dévoiler notre intimité spirituelle. Remarquez que souvent cela est une réaction normale de légitime défense pour un mystère qui nous habite et que nous voulons protéger. Mais il faut reconnaître que souvent aussi, nous mettons tout en œuvre pour supprimer les quelques opportunités de conversation, de dialogue qui se présentent.

Autrefois, c'était le repas qui réunissait habituellement toute la famille et qui constituait une occasion favorable et privilégiée pour partager, échanger et renforcer les liens de la convivialité, de l’affection et de l’amitié. Aujourd'hui, malheureusement, dans de nombreuses familles, l'heure du déjeuner ou du dîner, se transforme souvent en une superbe séance collective devant la TV, la tablette ou le portable, pour être intelligemment en communication, non pas avec ceux qui nous sont proches, mais avec ceux qui sont loin. Ces gadgets sont devenus le substitut moderne du dialogue et une bonne excuse pour éviter de se rencontrer en profondeur. Alors se produisent des situations absurdes et incroyables ! Il arrive que dans une famille on ne se regarde plus ; on ne se remarque plus; on ne se parle plus; on ne se connaît plus et on devient de parfaits étrangers les uns pour les autres.

Oh, bien sûr, il y a toujours beaucoup de bruit dans la maison : un système de son toujours en marche; on parle de la température qu’il fait ou qu’il va faire ; on discute du match favori ; on jase au téléphone avec les copains, quand on ne se chicane ou ne crie pas...

Mais le dialogue authentique qui unit les personnes et les aide à grandir et à se développer spirituellement et humainement a disparu. Les mots qui expriment l'amour, la gentillesse, la tendresse, le souci des autres, le pardon, etc. ont disparu aussi.

Alors, ce n’est peut-être pas si inutile que ça, aujourd’hui, de profiter de cette fête pour réfléchir sur la qualité humaine et spirituelle de notre famille et de prier Dieu pour que tous ceux et celles qui la composent soient ou apprennent à devenir, à l’école de la famille de Nazareth, des éléments efficaces de croissance spirituelle et d’authentique humanité.

Bruno Mori - 29 décembre 2019

1 commentaire:

  1. Comment puis-je vous faire parvenir un message courriel P. Bruno?
    Danielle Laliberté à ndg@videotron.ca
    Merci!

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