Rechercher dans ce blog

lundi 2 décembre 2013

AU-DELÀ DU MYTHE, RENOUVELONS NOTRE ATTENTE




Avec ce premier dimanche de décembre nous entrons dans une nouvelle année liturgique et dans cette période précédant Noel qui, dans le langage ecclésiastique, est appelée «le temps de l’Avent». Ce mot vient du mot latin «adventus» qui signifie «la venue». Car, au cours de ces quatre semaines avant  Noel, les chrétiens se préparent spirituellement à célébrer la «venue»  sur terre,  de leur maitre et  Seigneur qui, selon le conte (ou mythe) chrétien, est descendu du ciel pour prendre chair dans le sein d’une jeune fille vierge, fécondée par une intervention miraculeuse de Dieu et cela il y a plus deux mille ans. Toujours selon cette légende chrétienne, l’intention de Dieu, en faisant naître parmi nous cet enfant  divin était de le sacrifier un jour, à travers une mort atroce, comme une victime expiatoire, afin de calmer la colère et le désir de vengeance qu’il ressentait envers les humains à cause de leur méchanceté et de leurs péchés. Le mythe chrétien qui nous vient de ce lointain passé est utilisé aujourd’hui encore par l’église catholique. La théologie officielle de l’Église, en plein XXI siècle, continue d’enseigner que ce «Fils de Dieu» est mort à cause de nous et de nos fautes; qu’il a accepté la mort pour nous réconcilier avec Dieu; pour obtenir de Lui la grâce et le pardon qui nous rétablissent dans son amitié et qui nous permettent de nous sauver, c’est-à-dire, d’échapper à la damnation éternelle.  Cet enfant divin, destiné dès sa naissance à une mort violente  par un père «divin»  exacerbé, cruel  et  irascible,  deviendra  un jour le Sauveur du monde. 

Il n’est pas difficile de se rendre compte  que la formulation du mystère chrétien véhiculée par le langage traditionnel de cette ancienne formulation du salut chrétien est totalement dépassée et inacceptable pour les chrétiens du XXIe siècle. Notre sensibilité moderne se refuse à accepter une telle représentation de Dieu qu’elle trouve non seulement de mauvais goût, mais aussi ignoble et blasphématoire. Les chrétiens de la modernité ne peuvent pas s’empêcher de se demander comment de telles absurdités ont pu surgir au sein de l’Église et pour quelles obscures raisons elles ont pu être acceptées, systématisées et propagées parmi les croyants au point de contaminer presque toutes les expressions et les énoncés du culte et de la liturgie chrétienne. En effet, partout dans les rites et les prières officielles de l’Église on persiste, aujourd’hui encore, à parler d’expiation, de rédemption, de sacrifice de la croix, de sacrifice de la messe, de Jésus victime immolée sur l’autel de la croix, de l’Agneau qui nous sauve  par son sang versé ; de l’Agneau de Dieu qui porte sur lui le péché du monde ou qui enlève le péché du monde; de Jésus qui s’offre à Dieu en victime expiatoire pour notre salut; de l’Innocent qui subit le châtiment à la place des coupables ; qui souffre pour réparer et expier nos péchés et qui nous libère  de  la punition et de la condamnation éternelles : «Par le sang que ton Fils a versé… tu as ramené vers toi, Dieu, les enfants que le péché avait éloigné... par sa passion et sa croix il nous a délivré de la mort éternelle… car  sa mort nous affranchit de la mort… car il est l’agneau véritable qui a enlevé le péché du monde: en mourant il a détruit notre mort ; en ressuscitant, il nous a rendu la vie ……( préfaces des messes).

Sans parler de tous les efforts que l’enseignement catholique déploie (à travers le discours officiel et à travers les affirmations et les formules du  culte)  pour culpabiliser les croyants ; pour enfoncer dans l’esprit des baptisés la conviction qu’ils sont des «pauvres pécheurs», des misérables transgresseurs, coupables et donc  responsables de la mort du Fils de Dieu; qu’ils  sont  venus  au monde dans le péché ; qu’ils naissent contaminés par une faute originelle, continuellement soumis à la menace du mal qui est partout présent dans leurs vies et dans le monde dans lequel ils vivent  et que, par conséquent, ils doivent s’en remette à la divine miséricorde pour obtenir la justification de leur existence, ainsi que l’espoir d’un possible salut. Un salut rendu possible grâce au pouvoir d’intercession auprès de Dieu que Jésus a acquis pour nous, en payant  Dieu de ses souffrances et  de sa  mort.

Il est clair que nous devons comprendre autrement et reformuler d’une nouvelle manière le contenu du mystère  de notre salut qui s’exprime et se rend présent dans la personne du fils de Marie de Nazareth, si nous voulons qu’il puisse continuer à avoir du sens et de l’intérêt  pour les gens d‘aujourd’hui. Il  faut  aussi qu’ il soit clair qu’il n’est pas question ici de vouloir nier ou refuser le fond (la substance) de l’annonce chrétienne  qui nous vient du passé et qui garde toute sa vérité, sa valeur et sa pertinence,  mais qu’il s’agit ici de la nécessité de la traduire dans un langage moderne qui soit accessible et surtout  compréhensible aux hommes et aux  femmes de notre temps.

C’est ce que nous essayons de faire tant bien que mal ici, au cours de nos rencontres du dimanche. Nous cherchons ensemble à déchiffrer, interpréter, reformuler, traduire, redire dans le langage d’aujourd’hui et adapter à la sensibilité moderne qui est la nôtre, une foi, un message, un enseignement, une révélation, des expériences religieuses qui nous viennent d’une tradition très ancienne et que nous ne pouvons cependant pas écarter du revers de la main. Car ce qui nous vient de ce passé a une portée universelle; fait partie, pour ainsi dire, du patrimoine culturel et religieux de l’humanité; appartient à la quête humaine des valeurs, de  la vérité, de ce qui est véritablement humain et divin en nous, mais qui est arrivé à nous enveloppé dans des mots, des expressions, des mythes, des images, des idées, des élaborations théologiques d’une culture et d’un monde révolus. Et puisque l’emballage ne nous plait plus, nous nommes souvent tentés, de jeter tout le paquet avec son contenu.

Aujourd’hui nous n’attendons plus la venue d’un Dieu qui descend du ciel partager notre condition humaine. Nous ne recourrons plus au langage du conte religieux pour exprimer le désir de renouvellement et de transformation que nous portons au plus profond de notre être. Il reste cependant que l’attente de quelque chose de merveilleux, d’un événement extraordinaire qui «vienne» changer la banalité de notre vie est toujours et encore au cœur de nos aspirations et de nos espoirs les plus chers. Comme les humains d’autrefois, nous  voulons aussi que notre vie réussisse. Nous voulons expérimenter, tout au long de notre existence, la satisfaction de rencontres enrichissantes avec des «anges»; l’annonce d’un havre de paix où nous pouvons un jour accoster en toute sécurité le bateau de notre existence  esquinté par le tempêtes de la vie; la surprise de découvertes qui nous lancent sur des chemins inexplorés. Nous soupirons toujours après les frissons de la passion et les extases de l’amour. Nous voulons nous confier à des puissances divines, bénévoles et accueillantes qui nous protègent et qui nous aident à dépasser nos peurs, qui, contre l’angoisse suscitée en nous par notre finitude et la certitude de notre mort, nous rassurent avec la promesse d’une vie éternelle. Nous attendons donc tous la venue de quelqu’un ou de quelque chose qui vienne nous rallumer et nous faire revivre. Il  n’y a pas de vie sans attente. De sorte que, lorsque plus rien ne vient à nous et que plus rien ne nous arrive, c’est alors que l’on meurt définitivement.


Si l’attente est au cœur de notre vie; si notre la vie est ce jaillissement merveilleux qui a pris son origine à la Source originelle de tout ce  qui existe et à laquelle les chrétiens, à la suite de Jésus, ont donné le nom de Dieu, alors il est sensé de penser que cette attente n’est pas  sans objet, mais qu’elle est comme la vibration causée en nous par une musique divine qui retentit quelque part dans les profondeurs mystérieuses de cette immense univers. Ce temps de l’Avent est donc là pour nous dire et nous rassurer que notre attente sera exaucée, et que, pour ceux qui savent espérer et regarder, le moment viendra où ils se rendront compte  que Dieu a vraiment pris corps dans ce merveilleux et fantastique univers.       

MB 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire