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mardi 4 septembre 2018

…L’Homme qui donne le pain …



(18e dim. ord. – Jn 6,24-35)

Nous savons aujourd’hui que le processus évolutif du cosmos et des espèces vivantes sur la terre se réalise à travers une suite ininterrompue d’échecs et de réussites, de bouleversements apocalyptiques et de fabuleux accomplissements. Ainsi, assistons-nous, au cours de l’histoire de l’humanité, à l’apparition continuelle et régulière autant de déchets que de chefs d’œuvre d’humanité; à des individus qui font honte et déshonneur à la race humaine et à d’autres qui en sont la gloire et l’orgueil. Nous voyons apparaître des personnages lugubres que l’on souhaiterait n’avoir jamais existés parce qu’ils ont obscurci et barbarisé l’histoire humaine par l’horreurs de leurs crimes et de leurs méfaits. Mais, nous assistons aussi à l’apparition de figures d’hommes et de femmes qui sont comme des étoiles qui surgissent au hasard des énergies attractives qui modulent la conformation de l’Univers et qui pendant des millions d’années éclairent de leur lumière l’immensité des espaces galactiques.

Ainsi, parmi les ratés de l’évolution humaine et pour rester seulement dans un passé récent, pensons, par exemple, aux tristes personnages de Hitler, Staline, Mao Zedong, Pol-Pot; ou, plus proche de nous, aux membres des mouvements intégristes islamiques du Moyen Orient (talibans, état islamique), à certains tyrans de pays africains, à certains présidents des grandes puissances modernes…
Parmi les réussites de l’évolution humaine, nous pouvons nommer des figures comme Bouddha, Lao, Platon, Jésus, Teresa d’Avila, Dante Alighieri, Michelangelo, Shakespeare, Mozart, Beethoven, Martin Luther King, Kierkegaard, Gandhi, Einstein, Nelson Mandela, Drewermann, Leonardo Boff,  etc.  ….. Ces personnes sont des modèles et des sources d’inspiration pour tous les humains. Ils sont des phares qui éclairent et indiquent le chemin à parcourir. Ils sont des faiseurs d’espérance et de beauté ; des prophètes qui annoncent la possibilité d’un monde nouveau, différent et meilleur. Ils sont les détenteurs d’une réelle sagesse. Ils nous communiquent des intuitions et des visions singulières sur la Réalité. Ils nous dévoilent de rêves et de projets inédits, souvent déstabilisants, certes, mais ayant le pouvoir d’interpeller, de faire réfléchir, de poser et de proposer des défis et d’inviter la race humaine sur des chemins jamais parcourus, afin de la faire progresser vers des horizons plus vastes et vers des réalisations et des formes plus accomplies d’humanité.

Jésus de Nazareth fait partie de cette catégorie d’humains particulièrement inspirante et réussie. C’est comme cela qu’il a été perçu par ses admirateurs et qu’il a été présenté dans la littérature chrétienne du premier siècle. Ainsi, les auteurs chrétiens des évangiles le décrivent-ils comme l’homme qui a su réaliser dans sa personne la synthèse la plus complète et la plus parfaite des qualités humaines, au point de le considérer comme une merveille et un miracle d’humanité; comme un homme venu de Dieu; comme un don du Ciel aux hommes ; comme le mètre et la forme sur lesquels chacun  de nous devrait désormais se mesurer et se modeler pour réussir la construction de sa propre humanité. Ainsi, pour ces auteurs anciens, Jésus est l’«Homme» et le «Maître» par excellence, sur la parole, l’enseignement et l’esprit duquel tout humain pourrait conformer et modeler sa vie.

Voilà pourquoi, dans le texte d’évangile que nous venons de lire, l’évangéliste Jean, friand d’images et de symboles comme tous les auteurs anciens, présente Jésus comme pain, nourriture, source d’eau vive, lumière que chacun doit chercher, s’il tient à satisfaire sa faim et sa soif d’absolu, de vérité, de gratification, de sens, de bonheur : faim et soif que chaque être humain, normalement constitué, un jour ou l’autre, ressent dans les profondeurs de son cœur.

Jean, avec les autres auteurs chrétiens du premier siècle, a vu en Jésus un exemplaire d’homme tellement accompli, que  son exemple, la réflexion sur les principes, les convictions, les attitudes, les forces et les virtualités qui ont régit sa vie, peuvent grandement aider et inspirer ceux et celles qui, dans une attitude de confiance amoureuse et admirative, acceptent de l’adopter comme référence ultime et source d’inspiration,  dans le but de bâtir leur existence sur le modèle et la forme de son humanité.

L’évangile (d’aujourd’hui) nous assure que les chrétiens qui acceptent de suivre ce Maître et de se modeler sur son esprit, deviendront des nouvelles créatures, des personnes d’une qualité «supérieure». Non plus des individus renfermés sur eux-mêmes, exclusivement occupés et préoccupés à mettre sur pied leur petit bien-être et leur petit bonheur personnel; individus qui accumulent et consomment des «choses», et dont les intérêts restent limités à la satisfaction de leurs  besoins primaires et biologiques…

L’évangéliste Jean nous assure que les humains qui cherchent Jésus pour le pain qu’il peut leur offrir, pourraient avoir la possibilité de devenir des individus différents : ouverts, capables d’avoir faim et soif de valeurs moins terre à terre, plus élevées et plus spirituelles. Ce qui signifie que l’imitation du Maître de Nazareth peut faire de nous des individus capables de spiritualité; c’est-à-dire, capables de s’intéresser à des réalités et à des contenus autres que ceux concernant uniquement le manger, le gagner, le posséder, l’accumuler, le consommer, l’avoir du  bon temps et  du plaisir.

La fréquentation du Nazaréen peut nous conduire à prendre conscience que, en tant qu’humains, nous avons un destin particulier en ce monde ; que nous sommes appelés à y  vivre à un niveau de conscience supérieure;  qu’il y a en nous quelque chose qui nous fait différents des animaux, puisque nous sommes capables de réflexion, d’émerveillement, de don de nous-mêmes, d’altruisme, de bonté, de tendresse et d’amour. Puisque nous rions, nous pleurons, nous espérons, nous désirons, nous nous languissons, nous sommes toujours insatisfaits. Puisque nous sommes porteurs d’une profondeur et d’un mystère qui nous dépasse et que, à cause de cela, nous pouvons nous interroger sur les raisons de la présence de la souffrance, du bien et du mal; sur le sens et le but de notre vie et de notre mort;  être assez sensibles spirituellement pour vibrer en consonance avec la Réalité ou le Mystère Ultime que nous appelons «Dieu».

La fréquentation de ce Maître peut nous aider à mieux nous orienter dans la vie, à découvrir les comportements, les projets, les quêtes et les conquêtes qui donnent vraiment consistance, qualité  et  profondeur à notre existence et qui nous bâtissent en tant que personnes riches d’une authentique sagesse et d’une attachante forme d’humanité : une humanité qui se manifeste et se déploie comme bienveillance,  bonté, compassion, partage, tolérance, attention et soin, autant en faveur  de nos  frères humains, qu’en faveur et pour le bien-être et la santé de notre Planète.

C’est pour cela que Jean fait dire à Jésus qu’il peut nous donner un pain capable de nous maintenir en vie pour toujours, maintenant et pour l’éternité. Ce texte veut finalement nous faire comprendre que le pain qui donne vie n'est pas le pain qu'on reçoit et qui se mange, mais le pain qui se donne. Si tu es épris de sa personnalité ; si tu es animé par son esprit, si tu deviens le bon pain qu’il a été, tu sauras ce que signifie vivre pleinement. Si tu te donnes, tu t’accompliras et tu seras heureux Si tu retiens tout pour toi et ne donnes rien de toi, tu te perdras; ta vie sera vide, tu t’appauvriras en humanité et tu seras un individu mesquin, triste et seul.

Cet évangile nous place donc aujourd'hui face à un défi radical : quelle est ma lumière, ma nourriture, mon eau ? Autrement dit: qui est le Seigneur de ma vie? Où puis-je trouver la source véritable de mon humanité ?


( Bruno Mori – 2 aout 2018)  

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