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lundi 20 mai 2013

Le mystère de l'ascension


Le mystère de l’Ascension du Seigneur

En tant que chrétiens adultes dans la foi, essayons de saisir la valeur symbolique de cette fête de l’Ascension du Seigneur. C’est une fête où  l’image, le symbole, la mise en scène ont clairement une grande importance dans la transmission du message.   
 En premier  lieu, ne pensons pas que Jésus ait attendu quarante jours pour retourner auprès du Père. C’est par la mort et sa résurrection que Jésus a  passé de ce monde à celui de Dieu. Comme pour chacun de nous, Jésus est  entré dans le monde de Dieu au moment où il a quitté ce monde en mourant sur la croix.

Les apparitions de Jésus à ses disciples qui sont racontées dans les quatre évangiles ne signifient pas que Jésus se serait attardé sur cette terre après sa mort un peu comme s’il était un genre de fantôme errant ou un  esprit en  peine à la recherche de son repos définitif. Ces apparitions sont des  constructions littéraires, des évangélistes qui ont un caractère éminemment catéchétique; elles veulent instruire les chrétiens sur la permanence, la continuation, la vérité et la réalité de la présence du Seigneur  parmi les siens après sa mort et malgré sa mort. Elles  veulent transmettre la conviction profonde qui  a animé la communauté chrétienne dès le tout début  de son existence : après sa mort le Maître est devenu le Seigneur vivant  non seulement par Dieu et en Dieu, mais il continue à être vivant dans la communauté de ceux qui ont cru en lui et auxquels il a transmis son Esprit. Les évangélistes cherchent donc à entretenir et à renforcer cette foi en sa présence vivante par des procédés littéraires où les scénarios ont pour fonction de présenter Jésus dans le rôle du Vivant qui apparaît et parle à ses disciples pour les convaincre et les assurer de la réalité de sa présence. Ces récits ont donc comme objectif de confirmer la foi des disciples en la présence de Jésus toujours vivant et d’entretenir en eux la certitude que le Maître ne les a ni laissés, ni abandonnés, mais qu’il est toujours  là,  avec eux, d’une façon nouvelle, mystérieuse, certes, mais cependant vraie, réelle, pour continuer en eux, avec eux et par eux l’oeuvre qu’il a entreprise sur terre.
  
Le récit  de l’Ascension du Seigneur se situe dans la même ligne de pensée et participe du même genre littéraire de tous les autres récits de la vie de Jésus après sa mort. Donc nous ne devons pas nous arrêter aux détails littéraires, anecdotiques qui sont souvent cocasses, pittoresques et fantastiques, mais chercher à découvrir le message que le texte, à travers ces  images, veut nous communiquer.

Quel est donc  ce message?
Le message de l'Ascension peut se résumer en trois exhortations : élever notre regard, garder confiance jusque dans l'inattendu, prendre en charge notre destinée.

Élever notre regard. Non pas pour fuir la réalité ou voir les choses de si haut qu'on ne les perçoit plus du tout, mais pour s'habituer à observer les êtres, les événements  avec les yeux de Dieu, ou plutôt avec les yeux de Jésus. Le Maître-Jésus, s’il est parti, nous a cependant  laissé son regard, sa vision, sa façon de voir et de percevoir le monde, les hommes et Dieu dans notre vie. Ce regard nous aide à donner du sens à la réalité et nous empêche de sombrer dans cette angoisse existentielle qui caractérise  souvent la vie et surtout la pensée de ceux qui n’ont pas la foi. Ceux de nous qui sont tant soit peu familiers avec les écrits d’Albert Camus ou de Sartre, par exemple, savent comment ces écrivains sans foi parlent de l’absurdité de l’existence, le silence du monde, son absolue opacité; aucune réponse nous vient de la réalité cosmique ou matérielle qui puisse nous éclairer sur le sens ou le pourquoi de notre présence humaine en ce monde : « Je ne sais pas si ce monde a un sens qui le dépasse. Mais je sais que je ne connais pas ce sens et qu'il m'est impossible pour le moment de le connaître. Que signifie pour moi une signification hors de ma condition ? » (Camus). Du monde qui nous entoure nous en connaissons  les lois, mas pas le sens, ni la finalité. Sans la foi la réalité physique (et nous-mêmes) reste une indéchiffrable énigme. 

Voilà pourquoi pour ces gens sans foi,  la solution est soit la résignation dans le fatalisme, soit la révolte dans l’agressivité et la violence: se battre  pour survivre dans un monde fermé et absurde et dans lequel nous sommes insignifiants et sans importance aucune. Voilà  pourquoi sans la foi souvent nos rapports se déploient à l’enseigne de la violence, de l’agressivité, de l’exploitation, de la compétition farouche dans un monde sans ouverture, sans souffle, sans horizon, sans perspective, et où l’autre est perçu non pas comme un semblable, un proche, un frère, mais comme un  adversaire, un opposant, un concurrent,  un obstacle à notre réussite, à notre avancement, à notre succès, à notre insertion en un monde fondamentalement hostile, inhospitalier et sans âme.

Seulement si nous avons ce regard  qui nous vient d’en haut, qui nous vient de Dieu, nous devenons capables non seulement d’apprivoiser la réalité, mais aussi de la rendre transparente. Seulement avec ce regard posé sur elle,  la réalité devient icône, signe, manifestation, parole d’une Réalité plus grande. Seulement si nous le regardons avec le regard de la foi la réalité devient  fraternelle, bénigne, bienveillante ; elle se transforme en  paradis, en  jardin, en maison, en lieu où est bâti le foyer d’une une présence pleine d’amour, à la chaleur et la lumière de laquelle se réchauffe notre cœur et s’éclaire  notre esprit. Et nous devenons alors capables de comprendre que l’absurde a un sens, que le silence possède une Parole et que  l’obscurité est traversée par une immense lumière. Car finalement tout est œuvre et manifestation d’une présence pleine de bonté et d’amour qui nous dépasse, certes, mais qui nous saisit cependant fermement dans la matérialité et la finitude de notre condition humaine, pour nous propulser vers un accomplissement extraordinaire qui s’appelle humanisation, illumination, transformation, renouvellement intérieur, sanctification, salut, manifestation de Dieu en nous, présence de son Esprit de sagesse et de l’amour au cœur de notre être, de notre existence et de notre monde .

Garder confiance jusque dans l'inattendu. L' Ascension  rappelle aux chrétiens que Jésus quitte leur proximité visible et disparaît à leurs yeux. Alors commence vraiment le temps de la confiance. Cette confiance qu'il nous faut maintenir, même dans l'imprévisible, dans l'absence, dans les plus fortes tensions de l'existence. Une flamme veille toujours au creux de l'absence, qui ne demande qu'à nous éclairer.

Prendre en charge notre destinée. « Pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? » (Ac 1,11) disent les hommes en blanc aux apôtres fixant la nuée. Le départ du Christ est, en fait, un appel à un plus grand engagement dans le monde. La foi n'est pas une fuite ou une démission, au contraire, nous sommes invités à nous mesurer à tous les défis présents et à faire jaillir l' espérance
 comme un cri lancé jusqu'aux limites du monde.


MB

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