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mardi 22 août 2023

 

POUR VOUS QUI SUIS-JE ?

(Mt 16,13-20)

 

Ce texte de l’évangile est habituellement interprété comme fondement biblique ou la preuve (divine)du pouvoir du Pape dans l’Église. « Voyez- nous disent les apologistes et les défenseurs de la primauté papale – ici Jésus lui-même choisi l’apôtre Simon pour en faire la pierre qui assurera stabilité et durabilité éternelle à la future église construite sur ce roc. Voyez, Jésus ici donne à Pierre seules les clefs de son royaume, c'est-à-dire le pouvoir et l’autorité d’ouvrir et de fermer les portes de son église; d’emprisonner ou de libérer; de lier et de délier ; d’obliger et de permettre; de condamner et d’absoudre. Voyez, c’est Jésus lui-même qui a voulu et établi le pouvoir absolu du pape sur les chrétiens catholiques, sur leurs consciences et sur leur sort éternel. Il est donc clair que la papauté est une institution d’origine divine. Donc, ne sont pas de bons des catholiques et vont contre la volonté de Jésus tous ceux et celles qui osent critiquer le pape ou mettre en doute ou désobéir à ses directives. D’autant plus que le pape, qui jouit d’une assistance spéciale de l’Esprit Saint, a été proclamé infaillible en matière de foi et de morale. Donc la contestation du pape est inadmissible dans l’église catholique.

 

De mon coté, ce matin, ce n’est pas de ce point de vue que je vais approcher ce passage d’évangile. Je vais plutôt essayer de me mettre dans la peau de Jésus et de comprendre pourquoi, un moment donné de sa vie, il a senti le besoin de poser cette question: « Qu’est-ce que les gens pensent de moi ? Comment suis-je perçu par ceux qui m’entourent et qui me connaissent ? » C’est une question légitime, importante, humaine. Une question que tous devraient se poser à un jour ou l’autre. Car cette question nous aide à mieux nous comprendre, à mieux nous connaitre, à voir plus clair dans notre vie et à mesurer l’impacte que notre existence exerce sur notre milieu; elle sert à déterminer notre empreinte écologique, pour ainsi dire. Parce que c’est de la réponse que l’on adonne à cette question que nous pouvons savoir si nous sommes pour notre milieu un atout ou une calamité, une ressource ou un désastre, une source de bonheur ou de malheur; si nous sommes sur le bon chemin ou pas; si notre vie a de la valeur ou pas; si le bilan de notre existence est dans le vert ou dans le rouge; si nous sommes en actif ou en passif ; si notre vie est succès ou un échec, une réussite ou gâchis.

 

Si nous étions tous seuls vivant dans le désert, une telle question n’aurait évidemment pas de sens. Mais puisque notre vie se construit par les relations que nous tissons et dépend en grande partie des relations que nous tissons et par l’influence que nous avons sur les autres, c’est la perception que les autres ont de nous qui nous révèle finalement à nous-mêmes et qui nous indique avec le plus de clarté et de vérité ce que nous sommes en en réalité et quelle est la valeur de notre existence et les répercussions de notre comportement et de nos convictions.

 

 On dirait que cette question dans la bouche de Jésus est le symptôme d’un malaise ou plutôt d’un doute de sa part. On dirait qu’il veut vérifier si son intuition et son sentiment d’être quelqu’un qui parle au nom de Dieu a une portée réelle ou si c’est simplement l’illusion d’un exalté et d’un visionnaire. Il veut s’assurer qu’il ne décroche pas de la réalité et que la mission qu’il s’attribue sert vraiment à améliorer et à transformer le monde autour de lui. En cela il nous donne un exemple de réalisme et d’humilité. L’illusion et l’erreur sont toujours possibles dans la vie d’une personne. Il faut savoir prendre le temps de douter, de s’interroger, de se remettre en question, de vérifier, pour ne pas courir le risque de s’agiter en vain. Et c’est seulement les autres qui peuvent nous ouvrir les yeux, nous signifier ce que nous valons et nous donner l’heure authentique sur l’horloge de notre vie.

 

Que de mariages, que des liaisons seraient sauvées, si les couples étaient capables de se poser, chacun à son tout, cette question de Jésus, afin de se voir et de s’examiner et de se régler sur le regard de l’autre et à partir de la perception de l’autre. Ne parlons pas des politiciens, des responsables d’entreprises et des finances, des autorités autant civiles que religieuses (pape, évêques, curés …). Quels bienfaits ils en retireraient, pour eux et pour la tâche qu’ils accomplissent s’ils étaient capables de se mettre à l’écoute de l’autre et surtout à l’écoute de ce que les autres pensent de leurs idées et de leurs agissements et de s’y ajuster.

 

Et si Jésus a l’humilité et le courage de nous poser cette question (« qui suis-je pour toi »), quelle est notre réponse, en toute sincérité? Pierre, emporté par sa fougue, son ardeur et son cœur a tout de suite trouvé sa réponse: « Pour moi tu es mon Messie, mon libérateur, mon champion et mon Dieu ! » Toute une réponse !!!! Pourrions-nous en dire autant? Je suis sûr que oui, au moins nous qui sommes ici, ce matin, en cette église. Car, si nous sommes ici, c’est parce que nous avons découvert et trouvé en lui un idéal de vie, une source d’inspiration, un modèle de liberté, un maitre qui nous a ouvert les yeux du cœur et de l’esprit sur ce que nous sommes au fond de nous-mêmes et sur ce que nous valons ; qui nous a révélé notre grandeur et qui nous a introduit dans la connaissance et la constatation de cet amour divin qui nous a englobe de fond en comble, qui transforme toute notre vie et qui colore d’une nouvelle lumière les relations que nous entretenons avec le monde, la nature et nos frères humains. Nous ne serions pas ici si nous ne sentions pas de l’attachement et de l’admiration pour cet homme qui représente désormais pour nous la présence des l’esprit et de la vie de Dieu en notre monde. Nous ne serions pas ici si nous n’étions pas convaincus que sa parole, se convictions, les valeurs qu’il transmet possèdent le secret de la transformation et du salut du monde. Pour nous aussi, comme pour Pierre, il est le Messie et le Fils du Dieu vivant.

 

MB

 

 (21 dim .ord. A – Mt 16,13-20)