(Jn 6, 24-35)
Jésus au
chapitre six de l’évangile de Jean utilise l’image du pain pour nous faire
comprendre qu’il y a deux sortes de nourritures qui produisent deux styles et deux
qualités de vie différentes: il y des aliments périssables, qui ont une date
d’échéance et qui donc, après un certain temps, sont dangereux pour notre
santé; et il y a des aliments non-périssables, de longue durée. Les premiers -
nous dit Jésus- ne sont pas fiables. Les deuxièmes (pensons aux produits en
conserve, aux produits secs, aux pâtes alimentaires..), ne seront peut-être pas
aussi appétissants et aussi agréables au goût que les premiers, mais ils sont
souvent là pour assurer le quotidien de notre vie. Il y a donc une sorte de
nourriture qui nous rassure et qui est toujours disponible dans notre dépense
lorsque nous sommes en difficulté. Nous pouvons compter sur elle !
Avec cette
comparaison de la nourriture Jésus veut nous faire comprendre que, dans notre
vie humaine et spirituelle, il y a aussi une nourriture qui est sûre et une
nourriture qui ne l’est pas et que nous devons donc surveiller très
attentivement comment nous nous nourrissons. C’est à cela que le Maître fait
allusion lorsqu’il parle d’une nourriture pour une «vie périssable»,
c’est-à-dire qui ne nous garantit rien de solide et de valable et d’une
nourriture pour une «vie éternelle», c’est-à-dire qui nous promet la réussite d’une
vie authentique et durable. Il nous rappelle donc que l’homme est ici sur terre pas seulement pour produire et consommer des biens et ainsi survivre quelque
temps; mais qu’il est là afin d’arriver à une plénitude et une qualité durable
de vie et que nous vivons non pas pour avoir des choses, mais pour être
quelqu’un.
Si
nous tendons l’oreille, voilà ce que Jésus cherche peut-être à nous dire à
travers ce texte d’évangile. «Vous ne pouvez pas et vous ne devez pas vous
contenter de pain matériel. Vous avez besoin aussi d’une autre nourriture. Vous
devez développer d’autres appétits, d’autres goûts, d’autres désirs, d’autres
intérêts. Vous ne devez pas vous laisser alourdir et vous encombrer par les
choses que vous accumulez ou que vous possédez. Ne devenez pas les esclaves de
votre compte bancaire et de votre avidité. Vous ne devez pas sacrifier votre
liberté pour obéir aux fausses sollicitations d’une société qui cherche à
créer en vous des illusions, qui vous pousse à consommer d’une façon impulsive
et frénétique en faisant croire que vous y trouverez votre bonheur. Ne
laissez pas votre bateau s’envaser, s’ensabler et s’enliser dans la grève,
faute de courage pour le conduire au large. Osez regarder plus loin que votre
port d’attache! Osez le vent du large! Osez mettre le cap vers
d’autres horizons, d’outres ports, d’autres rivages! Vous n’êtes pas faits
seulement pour consommer, pour dépenser des énergies, pour accumuler des choses;
pour emmagasiner des calories et chercher ensuite à les perdre… Vous n’êtes pas
faits pour vous égarer dans la drogue, vous noyer dans la bière, perdre du temps
dans la poursuite des derniers gadgets de la technique, des dernières
trouvailles de la mode; pour passer les trois quarts de votre temps libre
vautrés devant la TV à y subir un lavage de cerveau exécuté par une publicité aussi perfide et
subtile que bête et idiote; à vous laisser abrutir par des films farcis de violence
gratuite; à vous prostituer devant des programmes et des spectacles qui sont une
insulte à votre intelligence et qui sont souvent l’œuvre de réalisateurs bornés
et sans talent, qui pensent que tout le monde est comme eux et que le publique des spectateurs est composé en majorité des débiles mentaux…».
Dans
l’évangile d’aujourd’hui, Jésus cherche à nous ouvrir les yeux. Il fait appel à
la conscience de notre dignité et à notre intelligence. Il nous dit: «Chers
amis, vous n’êtes pas n’importe qui. Vous n’êtes pas nés pour un petit pain!
Vous n’êtes pas venus au monde seulement pour vous remplir le ventre ou le portefeuille.
Votre destin est plus noble que « métro, boulot, dodo». Vous êtes de la race de
Dieu. Vous êtes à son image. Vous êtes sa manifestation en ce monde; vous en possédez
les gènes; son Esprit est en vous! Vous êtes donc grands, vous avez une immense
valeur. Alimentez vous donc à la nourriture des dieux! Ne travaillez pas
seulement pour vous procurer une nourriture qui se perd. Donnez-vous de la
peine pour trouver un aliment qui se garde longtemps, qui nourrit non seulement votre corps, mais aussi votre esprit. Et ce qui nourrit votre esprit vient des
profondeurs les plus secrètes de votre être; là où se trouve le siège de la présence
de Dieu. Ce qui nourrit votre esprit est un don de Dieu: un don qu'il vous
donne pour vous élever, pour vous ennoblir, pour vous faire grandir à la
dimension de votre immense dignité ...»
L’évangile
de ce dimanche devient alors une invitation à travailler pour nous procurer le
pain qui nourrit notre esprit: la poésie, la littérature, la musique, les arts,
l’étude, la lecture, la curiosité intellectuelle, la réflexion, la méditation,
le silence, l’émerveillement, l’attention à la nature, aux choses, aux
animaux, aux autres, la sensibilité, la gentillesse, la douceur, la tendresse,
l’amour, le pardon, etc.
Pour nous, les disciples du Maître
de Nazareth, notre nourriture c’est Lui: c’est l’attachement que nous ressentons
pour sa personne; c’est l’émerveillement que sa parole suscite en nos cœurs et qui
nous fait tressaillir intérieurement; c’est la fascination que sa personnalité
exerce sur notre existence; c’est l‘ouverture de notre esprit à son Esprit,
c’est-à-dire à ses valeurs, à sa foi, à sa perception de Dieu et de l’homme… oui
cela est notre pain! C’est de ce pain que nous devrions nous alimenter! C’est
ce pain qui est capable de nous soutenir vraiment! Ce pain est son Esprit en
nous, son Dieu d’amour découvert dans les profondeurs de notre être, son
immense liberté, sa vision de la réalité… toutes ces valeurs qui nous viennent
de Lui, qui creusent une trace profonde dans notre cœur et qui orientent les
choix fondamentaux de notre existence.
Voilà donc l’autre
genre pain que nous devons mettre sur notre table! Voilà la vraie nourriture
donc nous avons besoin pour faire grandir en nous notre humanité! Sans ce pain
nous ne sortirons jamais de notre animalité. Nous resterons au niveau du sol et
nous n’atteindrons jamais les hauteurs auxquelles nous sommes appelés en tant
que créatures faites à l’image de Dieu.
Et voilà pourquoi dans l’évangile de Jean (chapitre 6), Jésus se pose devant nous comme le pain que nous devons manger. Ceux
qui se nourrissent de lui (de ce qu’il est, de ce qu’il fait, de ce qu’il dit,
de ce qu’il pense…) feront l’expérience de ce qu’est une vie heureuse,
lumineuse et réussie aux yeux des hommes et aux yeux de Dieu.
BM
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