Rechercher dans ce blog

dimanche 14 avril 2013

Vivre avec l'oreille tendue à la voix sur l'autre rive


COMMENT  SURVIVRE AUX TEMPÊTES DANS NOS VIES 

(Jn 21,1-19)

Ce récit est une parabole de notre vie. Il cherche a nous dire quelles sont les caractéristiques d’une vie humaine qui soit vraiment réussie et signifiante.

Les disciples sont décrits ici comme ayant repris leur métier d’antan. On les sent  frustrés, déçus, désenchantés après leur aventure avec le prophète de Nazareth, finie en queue de poisson. Il y a ici une allusion voilée, mais réelle, au caractère dramatique et cruel de l’existence lorsqu’elle n’est pas soutenue par la confiance qui vient de la foi.  Presque jamais dans la vie on n'obtient les résultats que l’on espère. Rarement nos accomplissements sont à la hauteur de nos attentes et il y a si peu de rêves qui deviennent réalité. Même maintenant, ces hommes sont là à s’échiner à la besogne, au bout d’une longue nuit, épuisés par un travail ingrat…. et les filets toujours vides.

Remarquez les images qui composent ce récit comme une toile de fond et qui reviennent sans cesse: la nuit, le lac, l’eau, la barque, les filets, les poissons, la voix, le rivage. Dans la Bible la nuit est le symbole de nos égarements, de nos aveuglements, des pulsions obscures en nous qui cherchent à nous diviser. La mer ou le lac, avec les eaux profondes, insidieuses, est le symbole de tous les dangers qui guettent notre voyage vers l’autre rive; une traversé sans cesse menacée par les vents et  les tempêtes qui risquent à tout instant de faire couler notre bateau.

Plus notre voyage avance dans la nuit des années de nos luttes, de nos misères et de nos épreuves, plus nous approchons de l’aube. Et quand le nouveau jour se lève, nous sommes obligés de faire le bilan de nos vies. Alors, c'est comme si un appel nous arrivait de l'autre rivage; comme si quelqu’un  nous demandait ce que nous portons dans la cale de notre bateau. Il s'agit d'une voix amicale qui nous interpelle, une voix qui nous rappelle que nous sommes, malgré tout, des « petits enfants» aimés par Dieu et que, par conséquent, notre bateau devrait  être rempli de toutes ces bonnes choses que les enfants de Dieu sont capables de produire et qui devraient pouvoir satisfaire notre faim et notre soif de bonheur, de sécurité et de salut. La voix qui vient de l'autre rive nous demande: «Qu’est ce que vous avez de bon dans votre barque? Quelles valeurs transportez-vous? Avez-vous du poisson?». Quelle tristesse, si après tant d'efforts, après tant de travail, après tant de temps passé à lutter contre les intempéries et les dangers de la mer, après un longue vie en quête de fortune et de félicité, quelle tristesse si nous devions répondre comme les pêcheurs de ce récit : « Non, nous n'avons rien de bon. Nous n’avons rien ramassé qui vaille la peine. Nous n’avons rien pris qui puisse satisfaire notre faim ; notre bateau est vide, nous avons travaillé toute la nuit pour rien ! »

Ceux qui, malheureusement, arrivent à la fin de leur voyage avec le bateau vide, ce sont  ceux qui  se sont laissés fourvoyer par d’autres sirènes, d’autres sollicitations ; ce sont ceux qui se sont laissés séduire par d’autres appâts, qui ont suivi d’autres appels et n’ont pas porté attention à la voix qui leur venait de l'autre rivage.

Selon l'Évangile d'aujourd'hui, l’autre rivage c’est le lieu où se trouve maintenant notre véritable ami, notre Maître et notre seul et vrai Seigneur, ressuscité d'entre les morts et présent à travers sa Parole et son Esprit. Si nous voulons que notre bateau arrive sain et sauf sur la rive de l'éternité, chargé de bonnes choses, nous devons vivre avec l'oreille continuellement tendue à l’écoute de sa voix, afin de nous laisser pénétrer et transformer par la force et la grâce de sa Parole. Et cette voix nous dit que pour réussir notre vie nous devons lancer «à droite» nos filets.

La  «droite» dans la Bible, est le lieu de la présence et de l’énergie vivifiante de  Dieu: «Je garde sans cesse le Seigneur devant moi, parce qu'il est à ma droite, je suis inébranlable" (Ps 16, 8). La droite indique le lieu de la force divine qui guérit, qui renouvelle et qui sauve. Ainsi le prophète Ézéchiel dans une vision voit jaillir du côté droit du temple un fleuve«d'eau vive» qui guérit tout ce qu’il rencontre sur son passage (Ez. 47,1). Sur le Golgotha, c’est le larron crucifié à la droite de Jésus qui entre avec lui au paradis. Encore sur la croix,  c’est de  son côté droit transpercé de Jésus que sortent l'eau et le sang, symboles des sacrements qui sauvent. Dans l'évangile, il est dit que Jésus, après sa mort, est assis à  la droite de Dieu, pour indiquer qu'il vit maintenant glorieux et transfiguré dans sa vie et sa présence. A la fin du monde, lors du jugement dernier, les justes seront placés à  droite et les méchants à gauche, pour signifier que les premiers seront proches et les autres éloignées de Dieu.

Jeter les filets «à droite»  signifie alors vivre et travailler avec Dieu et en la présence de Dieu. Cela signifie garder notre vie orientée vers Dieu et notre prochain. Cela signifie être réceptif et sensible à cette voix qui nous appelle de ce rivage lointain vers lequel se dirige le bateau de notre existence.

C’est seulement  ainsi que notre vie devient féconde, que notre barque se remplit et que nous ne risquons pas de voguer inutilement. C'est pour cela que dans l'Évangile d'aujourd'hui il est dit que la barque se remplit presque jusqu’à couler lorsque les apôtres jettent les filets à droite, obéissant à la parole du Seigneur.

Non seulement cela, mais si nous vivons ouverts à Dieu; si nous travaillons en faisant le bien, notre cœur, notre esprit et toutes nos facultés deviendront nécessairement plus sensibles aux valeurs de l’esprit. Nous deviendrons alors des personnes capables de vibrer en harmonie avec Dieu et peut-être s’allumera en nous le désir de découvrir les signes de sa présence et d’expérimenter le bonheur de le sentir proche et comme une partie intégrante de notre existence.

Cette capacité à reconnaître le Seigneur et cette impatience de le rencontrer sont exprimés dans l'évangile d'aujourd'hui par le cri du disciple que Jésus aimait "C'est le Seigneur» et par le geste passionné, fougueux et un peu fou de Pierre qui se jette à l'eau pour arriver plus vite auprès de son Seigneur.
Et chose étrange! Jésus sur la rive où il nous attend n'a pas besoin de nos poissons. Les poissons que nous avons pris, à savoir les bonnes œuvres que nous avons accomplies lors de notre passage en ce monde n’ont été qu’un moyen  pour nous garder ouverts à Dieu et à nos frères. Ils ne servent pas pour notre repas, c’est-à- dire, pour notre bonheur et notre salut. Jésus a déjà préparé pour nous la nourriture que nous rassasiera lorsque nous l’aurons rejoint sur l’autre rive. Cela signifie que notre salut est gratuit; qu’il est un don et une grâce que nous recevons uniquement de la bonté et de l'amour de Dieu et qu’il n'est pas un droit que nous avons acquis à cause de nos mérites et de nos bonnes œuvres.

Chaque fois que nous nous réunissons pour l’Eucharistie du dimanche, nous reconnaissons  que le Seigneur est présent parmi nous et qu’il nous nourrit du repas qu'il a préparé afin que nous ayons les forces nécessaires pour  le rejoindre un jour sur le rivage de l'éternité.



MB

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire