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vendredi 29 mars 2013

La croix inhérente à notre condition humaine


La croix symbole de nos déchirements

Dans un livre de Françoise Dolto intitulé les évangiles au risque de la psychanalyse, elle dit que, selon elle, la croix représente nos tiraillements entre le haut et le bas pour l'axe vertical, c'est-à-dire entre nos aspiration et nos désirs qui nous élèvent et nos aspirations terrestres, nos pulsions et nos besoins, et entre la droite et la gauche pour l'axe horizontal, c'est-à-dire entre notre raison et notre cœur.

Cette image est tellement vraie. Que de souffrance dans nos vies lorsque nous nous trouvons dans des situations dans lesquelles nous sommes tiraillés, écartelés, déchirés par des élans contraires, par des choix impossibles à faire...quand le cœur nous dit quelque chose et notre raison ou notre conscience nous dit le contraire, quand nos élans spirituels nous poussent dans un sens et nos pulsions dans un autre.... Ce sont là les déchirements inhérents à notre condition humaine, car nous avons des aspirations profondes, élevées, nous sommes des êtres spirituels,  nous avons une conscience et une capacité de raisonnement, mais nous sommes également régis par un tas de pulsions et de besoins plus ou moins conscients. Tantôt nous pensons pouvoir toucher le ciel et l'instant d'après nous nous écrasons par terre....car nous sommes tous à la fois fils de Dieu et fils d'homme, nous portons tous cette dualité en nous, source de nos contradictions et de nos ambiguïtés.
Quand nous aspirons à être bons, à être justes, mais que dans la réalité nous nous rendons compte que jour pour jour nous commettons des injustices, que nous blessons d'autres personnes, même celles que nous aimons le plus....Quand nous sommes en quête de Vérité et que notre vie est remplie de mensonges.....Quand nous aimerions mettre notre vie au service de notre prochain, mais que les forces nous manquent.... Quand notre cœur nous pousse dans les bras de cet Amour si fort, et notre raison nous dit que c'est de la folie...Quand notre raison nous dit que nous devrions faire telle chose (p.ex. avorter), mais que dans notre coeur on souffre déjà rien que d'y penser... Faut-il écouter son cœur ou sa raison ? Bon choix, mauvais choix, quelle direction prendre? Les exemples sont multiples.

Hier je lisais une nouvelle d'Eric Emmanuel Schmitt dans laquelle il raconte l'histoire d'une femme qui vit un calvaire quotidien avec un mari épouvantable, vulgaire, fainéant, qui la trompe continuellement et ouvertement avec d'autres, et cette femme poussée à bout finit dans les bras d'un amant qui lui l'aime vraiment. Lorsqu'elle est sur le point de quitter son mari pour fuir avec son amant, le mari fait un AVC et se retrouve dans un état de perte d'autonomie et donc complètement dépendant des soins d'autrui. Eh bien, elle va finalement rester avec son mari pour prendre soin de lui. Quelle décision difficile à prendre, elle a dû renoncer à son bonheur avec son amour, à son désir si intense de recommencer enfin une nouvelle vie, une vraie vie, pour se dévouer entièrement à son mari ingrat...Mais n'a-t-elle pas tout de même pris la bonne décision ? Si elle avait suivi son cœur et qu'elle serait partie avec son amant, laissant là son mari souffrant, le père de ses enfants, elle n'aurait jamais eu la conscience tranquille, aurait-elle vraiment pu goûter pleinement la vie avec son amant, aurait-elle vraiment été heureuse?

Jésus a-t-il aussi connu ce genre de tiraillements ou de déchirements ? Oui sans aucun doute.  Nous savons qu'il a été tenté dans le désert et il s'agissait là justement d'un tiraillement entre ses élans spirituels, son ''obéissance'' à Dieu et à son plan et entre des attraits plus terrestres, comme l'utilisation de son pouvoir ou de Dieu pour des fins personnelles, pour son prestige personnel. Nous savons aussi que durant sa passion il a souffert: il a pleuré des larmes de sang, il a été désespéré (Mon Dieu pourquoi m'as tu abandonné) et il aurait voulu échapper à son supplice (Mon Dieu éloigne de moi ce calice, cependant que ta volonté soit faite et non la mienne). Donc, oui en tant qu'être humain lui aussi a connu des tiraillements et des souffrances.

Mais ce qui rend Jésus si spécial, c'est que malgré ses faiblesses, il a été de l'avant, il a réussi à les dépasser, car dans ses actions, dans son agir et dans son dire, il a su toujours faire passer en premier la volonté de Dieu. Ses aspirations divines ont toujours été finalement plus importantes que ses besoins personnels. Il n'a jamais perdu de vue, comme un horizon à atteindre, sa mission divine, son aspiration à quelque chose de plus grand que lui.

Jésus, tout comme nous, à la fois fils de Dieu et fils d'homme a aussi connu des tiraillements, mais chez lui le fils de Dieu a toujours pris le dessus.

En effet, Jésus a toujours été intègre, fidèle à sa Vérité profonde, à ce qu'il pensait être la volonté de Dieu, il n'a jamais fait de concessions, il n'a jamais été faux, il n'a jamais été contre ses convictions intimes, il affirmait ce qu'il avait à dire, peu importe les conséquences...et c'est ce qui l'a finalement conduit à la mort. Quand le mécontentement se fit grandissant autour de lui, il aurait pu calmer le jeu, tenter de tempérer un peu ses propos, afin de ne pas trop irriter les scribes, pharisiens et autres docteurs de la loi. Mais Jésus a choisi de continuer de dire ce qu'il avait à dire, la parole qui avait été semée en lui devait être dite, devait être propagée, répandue, afin qu'elle soit connue du plus grand nombre de personnes possibles. La bonne nouvelle que Dieu est son Père, que Dieu est notre père à tous et qu'il nous aime, la bonne nouvelle que nous sommes tous fils et filles de Dieu, le fait que l'amour de Dieu et du prochain est la clé qui permet de résoudre tous nos problèmes et le secret pour vivre une vie harmonieuse, le fait que cet amour passe même avant les lois, la bonne nouvelle que le règne de Dieu pourrait advenir sur cette terre si seulement nous y mettions un peu de bonne volonté, que cela dépend juste de nous en fin de compte...


Toutes ces bonnes nouvelles Jésus ne pouvait pas les garder égoïstement dans son cœur, il fallait les faire connaître et les dire. Il a voulu faire connaître son message au monde peu importe le prix à payer, car il savait que c'était Vrai. Il a décidé d'aller jusqu'au bout et en fin de compte sa mort l'a mené à la Vie éternelle. S'il avait tout abandonné pour vivre une vie normale, s'il avait fait des concessions avec les scribes et les pharisiens, il n'aurait peut-être pas été tué, crucifié sur une croix, mais il n'aurait pas atteint la résurrection, il n'aurait pas trouvé sa gloire en Dieu et sa bonne nouvelle qui était sa conviction la plus intime n'aurait jamais été aussi largement répandue, son message ne serait peut être pas parvenu jusqu'à nos jours. 


Parfois il faut traverser les ténèbres pour arriver à la lumière, parfois il faut sacrifier son bonheur immédiat pour atteindre un bonheur réel, parfois il faut choisir la mort pour atteindre la vie, parfois il faut s'oublier pour atteindre plus grand que soi, parfois il faut traverser la souffrance pour trouver la grâce de Dieu. C'est cela la lumière de Pâques.

Puissions nous aussi, à l'exemple de Jésus de Nazareth, nous laisser guider de la main de Dieu dans nos vies, c'est-à-dire de nous laisser guider par notre Vérité profonde, par les aspirations qui nous élèvent, par ce qu'il y a de bon en nous et devenir ainsi des personnes intègres.

Susanne Emery

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