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vendredi 17 avril 2015

La cause de Jésus n'est pas morte

RÉFLEXIONS POUR LE JOUR DE PÂQUES 2015

 La résurrection n’est pas épisode de la vie de Jésus qui pourrait être catalogué parmi les autres récits qui constituent la trame de sa vie terrestre ou qui pourrait constituer matière pour sa biographie. La résurrection n’est pas un fait historique temporel, physique, tangible qui pourrait être vu, photographié et placé dans les chroniques d’actualité d’un journal local. À la limite, on pourrait affirmer que le concept chrétien de résurrection ne concerne pas directement Jésus, mais principalement ses disciples. Dans le langage chrétien, le mot «résurrection» indique quelque chose qui se passe exclusivement dans l’esprit des personnes. Ce terme caractérise une expérience religieuse, spirituelle, intime, intérieure, mystique si l’on veut, que les premiers disciples de Jésus ont vécue dans leur âme. Les témoignages de cette «résurrection» que les évangiles nous rapportent, décrivent fondamentalement des sensations spirituelles vécues par des personnes croyantes qui, après la mort de Jésus, le perçoivent comme vivant et présent. L’intensité de leur foi et de leur attachement à l’homme de Nazareth, produit en elles la conviction que cet homme extraordinaire, qui après sa mort participe de la plénitude de la vie de Dieu, est maintenant plus que jamais capable de susciter, d’activer, d’intensifier et d’éterniser dans l’existence de chaque croyant les énergies bénéfiques et salutaires qu’il mettait en œuvre au cours de sa vie terrestre.

La résurrection est donc un phénomène spirituel qui se passe dans le cœur et dans l’esprit de ceux et celles qui ont connu et aimé Jésus et pour qui le Maître continue d’être important, influant, agissant et donc présent et vivant, même après sa mort et, je dirais même, surtout après sa mort. Les disciples de Jésus ont senti que la mort de leur maître n’enlevait absolument rien à l’importance de sa vie, de son message, de son projet, de son rêve. Ils se sont aperçus que les valeurs et les attitudes que le Maître avait incarnées, vécues, transmises, n’avaient pas disparues avec lui, mais qu’elles continuaient à être aussi vraies, aussi efficaces, aussi valables, aussi séduisantes que jamais. Après la mort de Jésus, ses disciples se rendirent compte que son Esprit n’était pas mort, mais qu’il demeurait vivant et agissant dans le cœur et l’âme de ceux et celles qui l’avaient connu et aimé. Après sa mort, les disciples ont senti non seulement que Jésus était vivant auprès de Dieu, dans la vie et l’amour duquel il était entré comme toute personne qui meure, mais qu’il persistait à être vivant dans la vie et le cœur de tous ceux et celles qui avaient cru en lui.

Après la mort de Jésus, non seulement ses compagnons ont continué à vivre de lui, mais ils ont continué à le sentir actif et donc présent dans leur existence. Et c’est sans doute à cause de cela qu’ils n’ont pas pu s’empêcher de le proclamer vivant et, pour utiliser leur vocabulaire, «ressuscité». «Le Maître vit; la mort n’a rien pu faire contre lui; il est toujours vivant et nous le sentons, l’expérimentons et le voyons dans notre vie!» Voilà l’annonce pascale des chrétiens!

Cela explique pourquoi les autorités religieuses juives qui l’avaient éliminé, ont réagi avec autant d’agressivité, de colère et de peur à l’annonce chrétienne de sa résurrection. Pourtant les récits de résurrections étaient monnaie assez courante dans la littérature populaire et religieuse de l’époque. Pourquoi alors s’en faire autant pour des racontars semblables venants de prosélytes désappointés? Pourquoi s’en faire si un mort a eu la chance d’être rendu à la vie par un miracle de la toute puissance de Dieu? Tant mieux pour lui! Aujourd’hui aucun de nous ne s’affole ou ne s’énerve à la nouvelle de la résurrection de Jésus de Nazareth. Cela nous laisse bien indifférents. Pourquoi cela ne laissait pas indifférentes les autorités juives du temps de Jésus? Sans doute parce qu’elles donnaient à ce mot un contenu différant du nôtre. Étant de la même culture, de la même religion et ayant la même mentalité que les premiers disciples de Jésus, elles avaient compris que la proclamation chrétienne «Jésus est vivant», ne faisait pas du tout référence à une revivification ou réanimation physiologique d’un cadavre; ni à un retour d’un mort à la vie corporelle, mais à la continuation de l’esprit de Jésus dans la vie de ses disciples. Les autorités religieuses juives qui avaient tout fait pour se débarrasser du Nazaréen, avaient saisi que l’affaire Jésus était loin d’être classée et que la cause de Jésus continuait de plus belle. Son esprit, son enseignement, son projet, son utopie continuaient à inspirer et à animer le mouvement spirituel qu’il avait initié. À travers ses disciples, Jésus poursuivait son œuvre. Si lui avait été supprimé, sa cause n’était pas morte. Ses adversaires n’avaient donc pas réussi à s’en débarrasser et à le faire taire. Ses adversaires avaient été battus. C’est cela qui a enragé les autorités juives qui ne voulaient pas s’avouer vaincues et qui ont tout mis en œuvre pour étouffer l’annonce chrétienne de la «résurrection» de Jésus.

Pour les disciples de Jésus croire en sa résurrection ne veut donc pas dire croire en une absurde et impossible réanimation d’un cadavre ou en une sortie physique du tombeau d’un revenant de la mort. Croire en la résurrection signifie croire que la cause pour laquelle Jésus s’est battu et est mort est valide encore aujourd’hui ; qu’elle est aussi notre cause; une cause pour laquelle il vaut la peine de vivre, de lutter et de mourir.

Croire en la résurrection de Jésus signifie croire que sa parole, son enseignement, son projet, sa cause expriment les valeurs fondamentales de notre existence. Cela signifie croire que son action, sa parole, sa pensée, sa foi, sa qualité d’humanité peuvent laisser des traces profondes et indélébiles dans notre existence, au point que notre vie peut en être complètement transformée. Ce qui est important ce n’est pas de croire en Jésus, mais de croire comme Jésus. Ce n’est pas d’avoir foi en Jésus, mais d’avoir la foi de Jésus. C’est de vivre selon son esprit et le style de vie qui fut le sien…et qui a fasciné le monde. Si notre foi reproduit la foi de Jésus (c’est-à-dire ses convictions, son idée de Dieu, sa vision de la vie et de l’histoire humaine, son attitude vis-à-vis des pauvres, des marginaux, des dérapés, ses options face à la richesse et au pouvoir), notre foi sera aussi critique, conflictuelle et combative que celle de la prédication des Apôtres ou de Jésus.
 À travers nous, ses disciples, le prophète de Nazareth poursuit son œuvre. Certes, pour nous il reste l’homme que la méchanceté humaine nous a enlevé; mais il est et restera toujours l’homme rempli de l’Esprit de Dieu, le modèle le plus accompli d’humanité, une lumière sur notre route et un chemin de salut. Il restera aussi celui que notre foi, notre admiration et notre amour continueront à rendre vivant et ressuscité dans notre vie et notre monde.
  

 BM

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