L’interprétation
théologique de la mort de Jésus en croix comme sacrifice expiatoire pour nos
péchés, nous fait oublier les véritables raisons historiques qui ont conduit
Jésus devant les tribunaux religieux et
politiques et finalement à son exécution sur la croix. Jésus n’a pas été la personne douce, timide, gentille
tendre, calme, aimante, paisible de l’imagination et de la piété populaire. Il
fut un prophète à la parole forte, parfois
violente et dure. Il fut un contestateur, un lutteur, un défenseur des faibles et des petits. Il s’est levé
contre le pouvoir injuste, l’hypocrisie, l’inégalité des classes, l’avidité, l’idolâtrie de l’argent,
l’injustice, l’exploitation des minorités et des pauvres. Il a lutté conte le
mal et la souffrance sous toutes ses formes. Il s’en est pris aux autorités religieuses et civiles de son
temps parce qu’elles représentaient des structures et des lois
oppressives, inhumaines. Il a cherche par tous les moyens à conscientiser
les responsables qu’il était possible d’être des personnes différentes, de penser
et d’agir autrement. Qu’il était possible d’envisager un autre style de vie, une autre société, un autre monde, une autre humanité. Qu’en opposition au
royaume de César il était possible de construire un «Royaume de Dieu».
C’est la
construction de ce Royaume de Dieu sur terre qui a été l’utopie de Jésus et pour
laquelle il a sacrifié sa vie. Jésus était un homme épris de Dieu. Il
était convaincu que Dieu lui avait donné mission de poser les fondations
d’un monde nouveau, non plus basé sur la recherche du prestige, de la gloire,
du pouvoir, mais fondé sur la volonté et le désir de ceux qui commandent de se mettre au service des autres, en se
faisant conduire non pas par les pulsions instinctives de l’égoïsme et de
l’intérêt personnel, mais par les
dynamiques, bien plus humaines, du don de soi, de la disponibilité et de l’amour. Jésus se considérait
l’instrument de cette intervention de Dieu dans le monde en vu de réaliser l’instauration
du «Royaume de Dieu». Instauration qui devait commencer évidemment par une
conversion et un changement à l’intérieur de l’homme.
Jésus est mort
a cause de son implication à la
réalisation de ce projet qu’il croyait être la seule façon de sauver le monde de sa ruine. Son action lui attira
l’opposition et la haine des
représentants des pouvoirs établis hostiles aux idées innovatrices de ce «visionnaire».
Il aurait bien voulu avoir la joie et la satisfaction de pouvoir assister, de
son vivant, à la germination des graines qu’il avait semées et à l’apparition
des signes laissant deviner l’éclosion
des forces bénéfiques de l’amour
capables de transformer le monde et d’y réaliser le rêve du Royaume de Dieu. Malheureusement
ce ne fut pas le cas. Jésus est mort comme un criminel, condamné par les hommes
et abandonné par Dieu. Il est mort en criant sa déception et son désespoir à Celui
qu’il avait pourtant toujours considéré comme son père.
Jésus sur la
croix est devenu le symbole et de tous ceux et celles qui, au cours de
l’histoire de l’humanité, ont donné et donnent leurs énergies et leurs vies pour une bonne cause.
Il est la figure de tous ceux et celles qui se sont battus et se battent pour changer les mentalités, pour transformer
la société, pour construire un monde plus pacifique, plus juste, plus fraternel, plus humain, plus égalitaire. Jésus
sur croix est le prototype de tous ceux et celles qui souffrent à cause de
l’égoïsme, de la méchanceté et de la stupidité humaine. Il représente les forces du bon sens, de la sagesse, du
respect, de la sollicitude et de la tendresse qui animent tant d’êtres humains
et qui sont heureusement là pour contraster les forces aveugles, insensées et
perverses du pouvoir, de l’avidité, de l’argent et du profit élevés à valeurs
absolues et qui risquent, si elles ne sont
pas endiguées, de conduire l’humanité et la planète à leur perte.
Les dernières
paroles de Jésus sur la croix furent, malgré tout, des paroles de confiance et
d’abandon dans la force de l’amour, personnifiée par son Père: «Père, entre tes
mains je remets mon esprit». Ces paroles
ont été sans doute proférées pour nous
faire comprendre que même l’apparente faillite d’une existence n’est jamais un
échec total, lorsqu’elle a été vécue pour implanter, dans une terre déchirée par les attaques de la folie humaine, les semences divines de la sagesse et de l’amour.
MB
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire