Notre vie, une question d’esprit !
(Fête de la Pentecôte 2022)
Dans la tradition
chrétienne, la Pentecôte est la fête qui célèbre la présence et l’action
d’Esprit de Jésus au sein de la communauté croyante.
Dans le langage
courant, on dit souvent que tout est une
question d’esprit. Je pense que c’est très vrai ! Dans l’être humain, en effet, l’esprit qu’un
individu possède informe et programme toute sa vie, module toutes ses attitudes
et son comportement, détermine de qualité de sa personne. La nature de son
esprit peut faire de lui un modèle ou un rebut d’humanité, une sainte personne
ou un individu diabolique (pensez à Staline, Hitler ou à Poutine et à d’autres).
C’est donc dire
l’importance de la qualité de l’esprit en nous et donc l’importance de le
puiser à une bonne source. C’est quand même extraordinaire de penser, qu’à
l’état actuel de nos connaissances, nous sommes les uniques créatures connues
dans l’Univers à être structurées comme matière spiritualisée et comme esprit
matérialisé et où l’esprit détermine la forme profonde de notre individualité
et de notre personnalité. Sans l’esprit nous cessons d’être des humains.
Or, dans l’être
humain, l’esprit peut prendre une double configuration et se déployer comme un bon esprit ou comme un mauvais esprit. Cela veut dire,
premièrement que l’homme peut être conduit par l’un ou par l’autre esprit et
ainsi déterminer la réussite ou l’échec de sa vie. Deuxièmement, cela signifie
aussi que le comportement global des individus qui composent nos sociétés a le
pouvoir de bâtir soit un monde qui prospère et s’épanouit dans l’harmonie, la
communion et la justice d’un amour fraternel, soit un monde bâti sur les
dynamiques du pouvoir individualiste et égoïste qui peut conduire l’humanité à
sa ruine.
Cette fête
chrétienne de l’esprit veut nous faire réfléchir sur ce fait et elle veut nous
pousser à prendre au sérieux notre rencontre avec l’esprit de Jésus de
Nazareth. Il s’agit en effet d’un esprit qui, d’un côté, semble surgir d’on ne
sait où pour mettre en crise, troubler, déstabiliser et faire fuir le
commun des mortels ; mais qui, de l’autre côté, possède des intuitions révolutionnaires,
une sagesse profonde et inhabituelle, un potentiel unique de transformation et
de renouvellement des personnes. Cela explique pourquoi sa présence parmi nous a immédiatement suscité un mouvement d’opposition et de refus, mais aussi une
forte vague de sympathie d’admiration et d’enthousiasme, surtout parmi les gens
simples et pauvres de son temps.
La rencontre des
disciples avec l’esprit, l’enseignement et le style de vie de leur Maitre a
ouvert leur esprit et leur regard à la vision et à la possibilité d’une société
et d’un monde tellement différent de celui dans lequel ils vivaient et qu’ils
considéraient comme normal, qu’ils ont tout de suite pensé que l’esprit qui
animait Jésus ne pouvait pas être surgi en
lui d’une intuition ou d’une vision purement humaines et personnelles, mais
qu’il devait lui venir d’ailleurs, d’une Source supérieure qui ne pouvait être
que divine.
Cette fête est
donc là pour dire d’abord à nous, les chrétiens et, ensuite, à tous les
humains : « Voilà Jésus et voilà le genre d’esprit qui devrait animer et
orienter votre existence ! C’est à cette source que vous devez boire ; c’est
sur cet esprit que vous devez mouler vos attitudes, vos comportements et
construire vos relations. L’esprit de ce Maitre d’humanité est véritablement le
BON esprit, le seul capable de donner valeur et qualité à votre vie et
d’assurer un salut, un bonheur et un future à votre monde ».
À ce point, la demande que nous nous posons
instinctivement est la suivante :«Mais pourquoi l’esprit de Jésus est si
bon ? Qu’est-ce qu’il a de si spécial et de si unique ? ». La réponse se
trouve dans le fait que Jésus a été un des premiers hommes, dans l’histoire de l’
humanité, qui a découvert que les dynamiques ultimes qui sont à l’origine de la Réalité et qui
soutiennent, dirigent et
développent tout ce qui existe dans l’Univers, sont essentiellement des
forces d’attraction, de communion, de relations qui interagissent et qui se
déploient avec une régularité, une
prodigalité et une gratuite sans limites et qui paraissent activées par une
intentionnalité amoureuse qui embrasse toute la réalité. Jésus a été le premier
humain qui a senti et expérimenté que partout «il y a de l’amour dans l’air», (comme chantait Martine St. Claire)
et que la seule place où et amour est absent, c’est souvent dans la vie et dans le cœur des hommes.
Jésus de
Nazareth a exprimé et symbolisé le Mystère à l’origine de ces énergies génératrices
et bénévoles à l’œuvre dans le monde, en utilisant l’image d’un Père maternel qui
met à l’existence ses créatures par pur amour et qui l’établit dans une relation
définitive d’amour inconditionnel avec elles (voir en Luc 15 la parabole du «Fils
prodigue »). Selon Jésus, il s’agit là d’un amour qui ne pourra plus jamais
être soustrait, enlevé ou refusé à ces enfants, et cela quoi qu’ils deviennent dans
leur vie et quoi qu’ils fassent de bien ou de mal. C’est donc une qualité
d’amour qui n’est liée ni à la prestation ni au mérite, mais exclusivement à la
condition « filiale » de ses créatures.
Jésus a été
l’homme dont la sensibilité de l’esprit a été capable de capter la présence de cette
qualité d’amour non seulement en dehors de lui (dans l’Univers), mais surtout
en lui et en tout être humain. Il été capable d’incarner cet amour dans sa vie et
il s’est donné comme mission de l’annoncer et de le transmette aux autres. Et
cela pour que, comme lui, chaque humain puisse, à son tour, se laisser conduire
par les dynamiques de cet amour qui se donne sans compter, qui crée fraternité
et communion dans un monde où tous se découvrent enfin « frères et sœurs » générés des
mêmes entrailles de miséricorde.
La pentecôte,
qui vient conclure le périple des célébrations consacrées au souvenir annuel
des « gestes » plus marquants de la vie de Jésus, est alors là
comme le point d’orgue final d’une sonate qui veut nous signifier que
tout ce que avons entendu sur Jésus et
son évangile au cours de l’année liturgique n’aura pas été du temps perdu seulement
si nous avons été capables de moduler davantage notre esprit sur le sien et si
nous avons mieux réussi à tisser nos relations avec le fil de son même amour (
fait de fraternité, de communion, de gratuité, de soins, de partage, de justice
et de miséricorde). Alors nous aurons contribué à faire reculer un peu l’ancien
ordre des choses basé sur l’amour du
pouvoir et à faire avancer le nouveau construit sur le pouvoir de l’amour.
3 Juin 2022
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