RÊVONS D’AMOUR, LES
AMIS !!!
(5
dim. paques, C -. Jn 13, 31-35 )
Nous, les humains, nous
sommes des drôles de créatures ! Nous avons été conçus dans une étreinte
d’amour, nous sommes entrés dans ce monde grâce à un geste viscérale d’accueil total, nous sommes
faits pour aimer, nous pouvons
aimer d’une façon « divine » … et pourtant nous sommes très mal à l’aise dans
l’amour ; nous parlons rarement et
difficilement le langage de l’amour ; nous ne donnons pas une grande valeur à l’amour et, dans notre vie,
nous agissons en donnant habituellement beaucoup plus d’importance à l’argent et au pouvoir qu’à l’amour.
On peut même dire que
la grande majorité des personnes n’ont aucune idée de la véritable nature de
l’amour. Ils en ont habituellement une conception sentimentale ou érotique. Ils
considérèrent l’amour comme un simple sentiment ou un attrait qui est, sans
doute, plaisant et gratifiant, mais qui ne peut pas être assumé dans la vie comme
une valeur principale et comme une attitude apte à soutenir la confrontation
avec les défauts des personnes et avec les contraintes, les exigences, les
luttes de la vie quotidienne, de la vie sociale, politique, économique dans le monde
que nous habitons.
Ainsi, pour faire un exemple,
dans le mariage, la rencontre de deux amours qui surgissent dans le cœur des amants
a habituellement une saveur d’éternité, un désir de don complet de soi à l’autre
et une volonté d’accueil total de l’autre dans sa propre vie. Cependant, dans la société civile et dans l’institution
religieuse, cette rencontre amoureuse, faute de pouvoir assimiler l’idée évangélique
d’un amour à fond perdu et inconditionnel, est immédiatement contaminée par le
virus de l’égoïsme et de l’individualisme et transformée ou plutôt pervertit en
une banale transaction commerciale, en
un «contrat» ( le «contrat de mariage) et en une « entente » qui durent le temps que
cela « convient » aux deux partenaires ,
mais qui cessera aussitôt que l’entente
n’existera plus.
Il s'en suit que dans une
la culture rationnelle, technique, pragmatique d’une société capitaliste, individualiste,
forcément égoïste et donc souvent cynique, le discours de Jésus de Nazareth sur
l’amour fraternel, gratuit et désintéressé n’est ordinairement pas pris au
sérieux. Il est considéré comme une charmante divagation lyrique d’un idéaliste
et d’un rêveur qui n’a pas les pieds sur terre et qui propose des utopies irréalisables,
compte tenu de la dure réalité de notre monde.
Avec cette attitude et cette
conviction, nous avons alors construit un monde où, je ne vis pas pour vivre,
mais simplement pour survivre, il faut se battre, être agressifs, compétitifs
et souvent impitoyables. Nous avons ainsi mis au point une société qui semble
exiger non pas le juste partage des biens dans la fraternité et l’égalité, mais
l’agressivité de la détermination à obtenir ce que l’on veut par tous les
moyens à notre disposition, même par le recours à la violence, à l’exploitation,
au pillage et à la dévastation insensée et stupide de la Planète. Et nous appelons
cela civilisation, bien-être et progrès.
Et pourtant dans l’histoire
de l’humanité, les rêves, les utopies, les projets retenus irréalisables, l’imagination
ont toujours été les grands moteurs qui ont accélérés la marche évolutive de
notre espèce, ainsi que de notre humanisation.
Il n’est pas nécessaire d’être des psychanalystes
ou des disciples de Freud, de Wilfred Bion, de Carl Yung ou de Eugen Drewermann
pour croire à la valeur des rêves à ouvrir
notre pensée à l’idée et à la possibilité de nouveaux commencements. Regardez
les jeunes à l’adolescence de leur vie ! Ils passent leur temps à rêver, à fantasmer
! Et c’est ainsi que surgissent les génies ! C’est ainsi que le futur se
profile ! C’est ainsi que le nouveau se dessine et que sont jeté les fondations
pour de nouvelles formes d’existence qui font avancer notre humanité. Car,
finalement, c’est de la qualité de nos rêves que dépend la qualité de notre vie
et de notre avenir.
C’est pour cela que
rêver d’amour ne peut jamais faire du mal à notre monde. Et c’est ce que Jésus
de Nazareth a fait ! Il a incarné et vécu un extraordinaire rêve d’amour :
gratuit, désintéressé et inconditionnel. En même temps, il nous a prouvé, par
toute sa vie, que son rêve pouvait devenir réalité, si seulement nous étions
intérieurement assez pauvres, assez libres, assez motivés, assez ouverts, assez
courageux et assez confiants pour l’adopter comme mode et style de relation
humaine et comme l’orientation de base de notre existence.
Alors, grâce à lui et à
sa suite, cela pourrait vraiment faire de nous, ses disciples, des promoteurs d’une
nouvelle façon d’être humain, des pionniers d’un nouveau monde et les premiers
spécimens d’une humanité recréé et renouvelée, car établie dans la communion et
la fraternité de l’amour.
Il s’agit cependant
d’un rêve auquel il est difficile de croire et qui est surtout difficile à accepter,
tellement il est subversif, révolutionnaire et contestataire. En effet il
annule et il condamne par principe le système de pouvoir, d’oppression et
d’exploitations sur lequel ont été et sont construites les sociétés, les politiques,
les économies et les relations humaines.
Déjà en son temps, Jésus
été éliminé à cause de son rêve. Aujourd’hui encore son message d’amour est
bien difficile à être accepté et bien loin d’être pris au sérieux, même si l’on
commence à se rendre compte qu’il constitue la seule Voie de salut pour notre
monde.
En effet, c’est seulement
lorsqu’un grand rêve devient réalité, qu’un bond en avant est réalisé dans la marche
évolutive de notre humanité. Avec Jésus de Nazareth, continuons à rêver d’un amour
fraternel, gratuit, généreux offert à tous sans distinction, car tous fils et
filles d’une même famille humaine, d’une même Terre-Mère, d’un même Univers,
d’un même Mystère Ultime qui est source de tout être, de toute vie et de toute
amour.
C’est la nouveauté de
cet amour inconnu auparavant, le grand héritage que Jésus du Nazareth a laissé à
l’humanité et particulièrement à nous, qui l’avons rencontré : « Je
vous laisse un commandement nouveau : comme je vous ai aimé, aimez-vous
aussi les uns les autres ! C’est à cette qualité d’amour que les gens sauront
que vous êtes mes disciples » (Jn 13,34-35). Ce sera donc dans la mesure où nous
serons capables d’incarner cet amour dans notre vie et de le diffuser autour de
nous, que nous pourrions vérifier l’authenticité de notre vie et de notre
cohérence chrétienne.
C’est tout un défi et tout
un programme de vie que Jésus nous a placé entre nos mains ! Hélas, dans le
passé, nous n'en avons pas fait grand-chose. Serons-nous capables d’en faire
quelque chose de plus dans le présent ?
Bruno Mori - mai 2022
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